Chaque jour dans le monde, 1.100 jeunes âgés de 15 à 24 ans sont infectés au Vih, signalent les experts de l’Onusida, notant toutefois une diminution de 54% en Afrique de l’Ouest et du Centre entre 2012 et 2022. Cependant, l’institution souligne que la riposte au Vih fait face à de nombreux défis, liés parfois à l’environnement social qui peut être hostile. Cette situation renforce la stigmatisation et la discrimination envers des Personnes vivant avec le Vih (PvVih), un des volets sur lesquels l’Onusida focalise ses actions au niveau de la jeunesse dans la région.
Au Togo, Yao Yayra Amega, 28 ans, diplômé en sociologie fondamentale, option santé et développement, est l’un des jeunes qui œuvrent pour la réduction de la stigmatisation à travers la lutte contre la désinformation et l’autoflagellation liés au Vih.
Yayra estime que le manque d’informations fiables favorise la stigmatisation dont sont victimes les Personnes vivant avec le Vih (PvVih). Aussi, s’investit-il dans la promotion de bonnes pratiques et d’informations utiles pour permettre à ses pairs, d’opérer des choix responsables, car pour lui, « chaque individu a le droit de mener une vie épanouie et productive, dans la dignité ».
« Je fais l’effort d’élargir le spectre de mes interventions pour qu’elles soient bénéfiques à tous les enfants, adolescents et jeunes affectés comme vivant avec le Vih. Il faut amener les jeunes à comprendre que le Vih n’est pas la maladie et si on observe le traitement indiqué, on peut vivre positivement, et s’épanouir », explique Yayra.
Son engagement est lié à son enfance et aux difficultés vécues : « Tout a commencé en 2007, quand une conseillère psycho-sociale m’a dit que j’ai le Sida. Cette annonce a complètement bouleversé ma vie et j’ai multiplié les tentatives de suicide. Je ne croyais plus à la vie, vu tout ce qui circulait comme information sur cette infection », raconte-t-il.
– Le Vih est pas une fatalité –
Son enfance a été marquée par la perte de ses parents depuis ses cinq ans, et surtout le poids psychologique du rejet familial ; un manque d’affection dû, non pas seulement au fait qu’il est le fruit d’une relation jugée extra conjugale, mais surtout à son statut sérologique : « J’ai finalement compris que je suis né séropositif. Mais la conseillère psycho-sociale aurait dû me dire que j’ai le Vih, mais que je peux vivre normalement si je prenais bien mon traitement », dit-il.
Aidé par ses pairs, il a fini par comprendre que le Vih n’était en rien une fatalité. Il a donc repris confiance en lui et décidé d’œuvrer pour que le Vih ne soit un facteur de désolation pour aucun jeune infecté. Sur ce volet, maman Diane se souvient de son soutien : « Yayra parcourait une longue distance pour venir parler à ma fille et l’aider. Aujourd’hui, Diane ne pleure plus à cause de l’infection. Ma fille a complètement oublié les insultes de son père et repris confiance en elle », se réjouit-elle.
– Rompre avec les complexes et les préjugés sexuels liés au Vih –
Depuis 2016, Yayra s’intéresse à la qualité de vie et à la prise en charge globale des PvVih en général et
plus précisément des jeunes et adolescents infectés comme affectés par le virus, à travers des sessions de renforcement de capacités, des discussions de groupe, etc. pour favoriser une mentalité positive, le renforcement du leadership et l’estime de soi.
« J’appuie aussi des initiatives visant l’éducation complète à la santé sexuelle et reproductive pour aider les jeunes vivant avec le Vih à rompre avec les complexes et les préjugés sexuels liés au Vih », ajoute-t-il.
Yayra est Assistant suivi évaluation au sein de l’Observatoire droits humains et Vih, un projet de l’Ong RAS+ où il supervise la collecte des informations dans la Région Maritime (Sud du Togo) et veille à la vérification des cas rapportés, afin de déclencher une référence si nécessaire.
Ce Jeune leader et pair éducateur est pris en charge par Espoir Vie Togo, une Ong au sein de laquelle il organise des rencontres et des groupes de parole, pour aider les jeunes à être observant au traitement antirétroviral car, dit-il, « c’est la base d’une vie positive avec le Vih ».
– Eviter l’auto stigmatisation –
« En 2022, j’ai pu réunir une centaine de jeunes vivant avec le Vih venant de plus de six structures associatives et publiques pour des échanges sur la vie positive avec le Vih. Nous sommes bien plus que notre statut Vih. Nous sommes une force de la nature, des leaders capables de réaliser des choses extraordinaires. Soyons fiers de qui nous sommes et embrassons la vie de façon positive, avec courage et détermination. Notre histoire est unique et précieuse, inspirons le monde en partageant notre lumière de résilience », a martelé Yayra.
Et Yayra ne compte pas s’arrêter tant qu’il y aura encore des jeunes en quête de lumière, de repère. Il sera comme son prénom, cette bénédiction dont ils ont besoin pour ne pas tomber dans l’auto stigmatisation qui ne cesse de comprimer de jeunes talents dont le Togo a besoin pour son développement. FIN
Ambroisine MEMEDE
(Bulletin d’information/ONUSIDA, p50)