Les Jeux olympiques ont certes moins la cote auprès des parieurs qu’un Mondial de foot, mais ils susciteront tout de même l’intérêt aux quatre coins du globe, poussant le régulateur français des jeux en ligne à redoubler de vigilance.
Au nord de Paris, dans l’Arena toute neuve de la Porte de la Chapelle qui accueillera cet été les compétitions de badminton et de gymnastique rythmique, l’Autorité nationale du jeu (ANJ) et Paris 2024 ont profité de la tenue d’Internationaux de badminton la semaine dernière pour sensibiliser les arbitres.
Rappel des règles de paris en France, avec l’interdiction de parier sur toute discipline des JO quand on est impliqué (athlètes, arbitres, bénévoles, prestataires…), sanctions encourues (jusqu’à cinq ans de prison ferme pour délit de manipulation, voire 10 ans si c’est en bande organisée)… L’intervention se veut pédagogique.
« Les JO ne sont pas la compétition qui suscite le plus de paris sportifs dans le monde, on est loin du Mondial de foot, mais c’est un événement avec des dizaines de disciplines sur lesquelles normalement, en France, on ne peut pas parier. Donc on se tient prêt en cas de problème », explique Corentin Segalen de l’ANJ, coordinateur de la plateforme nationale de lutte contre la manipulation des compétitions sportives.
« L’objectif c’est d’intervenir le plus en amont possible, avant même que les criminels aient pu placer des paris suspects », poursuit-il.
Pour cela, l’ANJ et Paris 2024 travaillent avec les arbitres, les coachs, les athlètes… pour leur indiquer la conduite à tenir s’ils sont approchés par quelqu’un qui souhaite truquer un match, souvent via les réseaux sociaux.
« On intervient depuis presque un an pour sensibiliser tous ceux qui participeront aux Jeux. Le risque existe il faut qu’ils l’aient en tête », opine Blandine Sorbe, directrice de la conformité pour Paris 2024.
Aux arbitres de badminton, un sport qui suscite beaucoup de paris, notamment en Asie, les formateurs rappellent un épisode des JO de 2012 où des joueuses avaient été disqualifiées par la Fédération pour avoir délibérément perdu, même si aucun lien avec des paris n’était apparu.
« Très rare »
Mais pour Gilles Cavert, arbitre international de ce sport, la manipulation des compétitions ne présente « aucun risque pour les JO. A très haut niveau c’est très très rare. Ca existe à un petit niveau », estime-t-il.
Cette année, les fichiers des fédérations seront croisés avec ceux des parieurs pour s’assurer que les règles soient respectées. L’ANJ dispose également d’outils pour analyser les cotes et déceler les comportements suspects, avec un accès au profil de chaque joueur.
« En France, le système est assez unique : la présidente de l’ANJ peut prendre une décision de suspension de pari. L’idée, c’est que les criminels ne gagnent pas d’argent avec les paris français et que les parieurs de bonne foi soient remboursés », explique Corentin Segalen.
L’enjeu est de taille : le marché des paris sportifs en ligne dans le monde est estimé en 2023 à plus de 63 milliards de dollars (soit 57 milliards d’euros) en Produit brut des jeux, c’est-à-dire la différence, empochée par les sociétés de jeu, entre les mises des joueurs et leurs gains, selon des chiffres présentés aux arbitres.
En France, l’année dernière, les mises totales sur les paris sportifs ont atteint 13 milliards d’euros, dont environ 8,5 milliards en ligne, selon l’ANJ, pour un PBJ de 2,4 milliards d’euros.
Pour les JO, « ce n’est pas forcement le genre d’épreuves sur lesquelles parient nos clients, car les athlètes sont moins connus mais on va bien sûr proposer des paris sur toutes les épreuves possibles », indique à l’AFP Nicolas Béraud, patron du site de paris Betclic.
Depuis le 1er mars, une nouvelle liste de compétitions sportives sur lesquelles les paris sont autorisés a été publiée par l’ANJ, avec le retrait de certaines compétitions sensibles à la manipulation.
Beaucoup de disciplines des JO y figurent, à l’exception des nouveaux sports (breaking, escalade, skateboard et surf), du basket 3×3, du plongeon, de la natation artistique, de la gymnastique, du tir, du dressage et du concours complet. L’ANJ indique n’avoir pas eu de demandes des opérateurs de jeux en ligne pour les intégrer à la liste.
SOURCE : AFP