Le président sortant de Madagascar Andry Rajoelina a été déclaré vainqueur de la présidentielle dès le premier tour par la commission électorale samedi mais la validité du scrutin, boycotté par une large partie de l’opposition, est déjà contestée en justice par un opposant candidat.
Selon la commission électorale (Ceni), Rajoelina, qui briguait un second mandat, l’a emporté avec 58,95% des suffrages exprimés à l’issue du vote qui s’est tenu le 16 novembre.
Ces résultats doivent encore être entérinés par la Haute cour constitutionnelle (HCC), plus haute juridiction du pays, chargée de proclamer les résultats définitifs au plus tard le 4 décembre.
Élu depuis 2018, Andry Rajoelina avait accédé une première fois au pouvoir en 2009 à la faveur d’une mutinerie chassant l’ex-président Marc Ravalomanana.
« Le peuple malgache a choisi la voie de la continuité, de la sérénité et de la stabilité », s’est-il félicité samedi devant la presse, assurant que les électeurs se sont « exprimés librement ». Mais les accusations d’irrégularités, de la part de l’opposition, se sont multipliées depuis le scrutin.
« J’ai déposé deux requêtes pour demander l’annulation du scrutin et la disqualification d’Andry Rajoelina », a déclaré à l’AFP le candidat de l’opposition, Siteny Randrianasoloniaiko, 51 ans.
Accusant le président sortant de fraude, il a ajouté : « Il a volé. Il a acheté les voix. La Ceni a changé les chiffres ».
Selon les documents déposés auprès de la HCC et dont l’AFP a eu copie, M. Randrianasoloniaiko a déposé une requête « aux fins d’annulation des opérations électorales sur l’ensemble du territoire ».
Les élections sur la grande île de l’océan Indien, depuis son indépendance de la France en 1960, se sont rarement conclues sans être assorties de contestations ou d’une crise.
Risques d’instabilité
Un collectif de dix opposants candidats, comptant notamment deux anciens présidents, a lui aussi dénoncé « des irrégularités flagrantes ». Ses membres, qui ont refusé de faire campagne, ont affirmé dès vendredi qu’ils ne reconnaîtraient pas les résultats de l’élection.
« Nous ne reconnaîtrons pas les résultats de cette élection illégitime, truffée d’irrégularités, et nous déclinons toutes responsabilités sur l’instabilité politique et sociale qui pourrait en découler », ont-ils mis en garde dans une déclaration commune également signée par Siteny Randrianasoloniaiko.
Le collectif avait appelé les électeurs à « considérer que ces élections n’existent pas » et à ne pas se rendre aux urnes. Le taux de participation est à peine au-dessus des 46%, en baisse par rapport à la précédente présidentielle de 2018. Onze millions de Malgaches étaient inscrits sur les listes électorales.
Le collectif d’opposants n’a pas indiqué à ce stade d’intention de saisir également la justice et n’a pas non plus appelé à redescendre dans la rue.
Quasi quotidiennement et pendant des semaines avant la présidentielle, le collectif avait appelé à manifester à Antananarivo. Les protestations, qui n’ont pas été massivement suivies, avaient été régulièrement dispersées à coups de gaz lacrymogènes.
La crise politique dans le pays a été déclenchée en juin par la révélation de la naturalisation française, en toute discrétion, d’Andry Rajoelina en 2014.
Selon l’opposition, cela devait l’empêcher de se présenter mais la justice a refusé d’invalider sa candidature.
Le collectif d’opposants a accusé le pouvoir de manœuvrer pour reconduire M. Rajoelina et dénoncé « un coup d’Etat institutionnel ». Ils réclamaient une suspension du processus électoral.
L’élection s’est déroulée « dans des conditions régulières et transparentes », a assuré samedi Arsène Dama, président de la Ceni, taxée par l’opposition d’être « à la botte du pouvoir ».
L’organisation a accusé le « climat politique » ainsi qu’une « manipulation de l’opinion » d’être à l’origine de la baisse de la participation.
Selon la loi, les recours en cas de contestation peuvent être déposés auprès de la HCC dans un délai de deux jours après la présentation des résultats par la Ceni. La haute juridiction a ensuite sept jours pour se prononcer et proclamer les résultats définitifs.
SOURCE : AFP