Des représentants des factions rebelles et de la société civile, ainsi que des universitaires, politiciens, activistes politiques au Darfour, ont adopté à Lomé une feuille de route et un plan d’actions, après deux jours de concertations.
Les conclusions de ce conclave ont été présentées lundi, lors d’une rencontre présidée par le ministre togolais des affaires étrangères Robert Dussey. Plusieurs diplomates accrédités au Togo ont assisté à cette rencontre, tenue dans un grand hôtel de la capitale togolaise.
Usant de son influence en Afrique et de sa longue tradition de médiation, le Togo a décidé d’abriter ces concertations pour que ces différentes parties puissent développer des idées qui pourraient conduire à l’adoption d’une position unifiée pour atténuer les effets de la guerre actuelle au Darfour, préserver la cohésion de la population et trouver une solution globale et durable à l’ensemble des crises soudanaises.
En près de quatre mois de guerre entre les paramilitaires (FSR) du général Mohammad Hamdane Dagalo et les troupes régulières (SAF) du général Abdel Fattah al-Burhane, plus de 3.000 morts ont été recensés. Près de trois millions de Soudanais ont été forcés de quitter leur maison – dont plus de 600.000 pour l’étranger – tant les exactions venues des deux camps se multiplient. Pratiquement tout le pays est la proie des combats. Depuis fin avril, le conflit a gagné le Darfour-Ouest puis le Darfour-Sud.
Au moins 20 civils ont été tués samedi au cours de tirs et combats au Darfour, et dans la ville d’El-Obeid, au Kordofan-Nord voisin, ont rapporté samedi les syndicats d’avocats et de médecins dans le Soudan en guerre.
« La région est actuellement plongée dans le chaos, mais pas encore dans une guerre civile à part entière. C’est ce que nous essayons d’éviter. Raison pour laquelle nous avons établi une feuille de route et un plan d’actions que nous pouvons suivre, afin de travailler avec d’autres leaders communautaires, d’autres leaders, d’autres dirigeants du Darfour, voire au sein du Soudan », a déclaré à la presse Nouri Abdalla, membre d’une faction rebelle du Darfour, et responsable du comité d’organisation des concertations de Lomé.
Dans la feuille de route, les parties prenantes ont accepté la réouverture de l’aéroport d’El-Geneina au Darfour, sous le contrôle des FSR d’Hamdane Daglo, afin d’acheminer l’aide humanitaire. Ils se sont engagés à assurer la sécurité des humanitaires qui sont prêts à venir en aide aux populations. Ils ont pris la décision de ramener la paix au Darfour, mais aussi de continuer les discussions avec les autres pour la paix dans tout le Soudan.
–‘Soudan first’ –
« Soudan first: La primauté de l’État soudanais doit guider tous les efforts, les discussions et solutions. L’intérêt du Soudan est fondamental, l’intérêt personnel doit s’éclipser », a plusieurs fois martelé le ministre togolais des affaires étrangères.
« Les Soudanais sont des gens résilients. Votre longue histoire de guerres, de révolutions, d’accords politiques atteste de votre résilience. L’esprit indomptable doit être exploité pour construire une nouvelle nation », a souligné Robert Dussey.
Quatre documents de fond liés aux crises soudanaises ont été présentés lors de ces concertations.
1) un document sur l’historique de la création de l’État soudanais et les déséquilibres qui ont accompagné sa création et sa continuité.
2) les raisons du déclenchement de la guerre du 15 avril entre le RSF et les SAF et les moyens d’y mettre fin.
3) l’historique du conflit intertribal à l’intérieur et autour d’EI Geneina dans l’État du Darfour occidental et les mesures à prendre pour mettre fin à l’effusion de sang et réparer le tissu social dans la région.
4) Un document sur les différents systèmes de gouvernance et d’administration civile existants et sur le système qu’il convient d’adopter au Soudan compte tenu de sa diversité, en particulier dans la région du Darfour.
« Nous recherchons tous la paix, le peuple soudanais recherche la paix. Il souffre de la guerre depuis des décennies dans des régions comme le Darfour, le Nil bleu, dans le sud et dans l’est du Soudan, et maintenant dans la capitale Khartoum. C’est le moment de mettre fin à la guerre et de commencer un nouvel avenir pour le peuple soudanais. La paix et le développement, la justice et l’égalité », a confié Youssef Ezzat, représentant des FSR.
Rappelons que des représentants des belligérants sont toujours en Arabie saoudite pour une hypothétique reprise des négociations en vue d’un cessez-le-feu. Vendredi soir, Khartoum a démenti « toute information faisant état d’une trêve proche ».
Dimanche dernier, des habitants du Soudan ont lancé un appel aux dons de nourriture pour survivre dans ce pays ravagé depuis plus de trois mois par une guerre sanglante entre l’armée et les paramilitaires. FIN
Junior AUREL