« La collaboration est de mise, car les forces de l’ordre collaborent déjà avec les populations. Nous devons aussi leur tendre la main pour que cette collaboration soit effective », martèle El Hadj Ibrahim Mondo, président de l’Union musulmane du Togo/Section Savanes.
« Nous soutenons nos forces de défense, car ils sont derrière nous. Nous les encourageons », renchérit Mitré Moussa, vulcanisateur à Dapaong (nord).
Le Togo, à l’instar des autres pays de la sous-région, fait face à des attaques terroristes notamment dans la région des Savanes (extrême-nord). Cette région a déjà enregistré cinq attaques terroristes dont deux meurtrières depuis novembre 2021. La première attaque meurtrière perpétrée en mai 2022, avait fait 8 morts (soldats).
La deuxième (la plus sanglante), menée dans plusieurs villages en juillet, avait fait « plusieurs morts et quelques blessés », selon l’armée togolaise, qui n’a pas donné de bilan précis. Cette attaque aurait fait 15 à 20 morts, selon plusieurs médias locaux.
La région des Savanes, est une zone en proie à des incursions des groupes terroristes présents dans les villages voisins sur le territoire burkinabè.
D’ailleurs plus de 600 burkinabè ayant fui des groupes terroristes à Madjoari (localité située dans le sud-est du Burkina) ont trouvé refuge dans des familles d’accueil à Dapaong (nord du Togo). Ces derniers ont bénéficié de vivres et de non-vivres, soutien du gouvernement togolais.
Parmi ces déplacés bukinabè, Mamadou Ouaba, l’ex-maire de Madjoari: « Au début, on avait cru que c’était l’affaire de l’État burkinabè et que les forces de défense et de sécurité allaient tout faire seules pour nous sortir de la situation. Aujourd’hui, la situation nous rattrape ».
« Ici à Dapaong, les Moba sont les dérivés des gourmantchés. Donc, ce sont nos frères. L’intégration a été très facile. Nous nous retrouvons entre nous, les gens qui parlent le même dialecte », a déclaré à la télévision nationale togolaise M. Ouaba.
‘Nous unir pour nous battre ensemble’
Le chef de l’État togolais Faure Gnassingbé est, lui-même descendu dans cette zone pour galvaniser le moral des forces de défense et de sécurité et des populations, car la situation était devenue critique.
« Que nous soyons membres des forces de l’ordre et de sécurité, dans l’administration, dans les ONG ou dans les organisations religieuses, nous devons nous unir pour nous battre ensemble, afin de préserver l’intégrité de notre territoire et protéger notre population », a lancé le président de la République, lors d’une rencontre d’échanges le 15 juillet dernier à Dapaong avec les autorités locales et traditionnelles, les responsables religieux et des représentants de la société civile.
« Le terrorisme n’est pas une guerre comme les autres, il n’y a pas de front. Parfois les ennemis sont autour de nous, parfois parmi nous et d’autres de l’extérieur. Parfois c’est une forme de trahison, des informations qu’on lâche ici et là. Ce n’est pas le moment de dévoiler notre stratégie, elle doit être secrète parce que l’information est aussi une arme de guerre. Nous devons rester vigilants, parce que le pire n’est jamais sûr dans ce domaine », a averti le président togolais.
Dans une union sacrée, les populations facilitent la tâche aux forces et défense et de sécurité dans l’application de l’état d’urgence sécuritaire décrété par le gouvernement dans la région des Savanes depuis mi-juin.
Des contrôles de sécurité sont menées dans toute la zone : la police et la gendarmerie procèdent parfois à des opérations de contrôle d’identité. Les forces de défense et de sécurité ont également le pouvoir d’interpeller sur la voie publique, toute personne qui par son comportement peut laisser croire qu’il y a des risques qu’elle puisse commettre un attentat.
La circulation et rassemblement de personnes sur la voie publique peuvent être interdits, avec la possibilité de suspendre les activités d’un établissement, d’une entreprise lorsqu’en raison des informations disponibles, il apparaît que cette société est plutôt une source qui pourrait être mêlée à des actions terroristes.
Éveiller la population sur les contributions dans la coproduction de la sécurité
« Nous disons à la population que pour sortir, il va falloir que chacun soit muni de ses pièces d’identité, parce que l’une des actions consiste à la vérification de ces pièces. On peut procéder à des perquisitions si c’est nécessaire etc… Que les populations soient informées pour que ces actions ne soient pas interprétées comme un abus », a conseillé El Hadj Oumowu Oudanou-Dobli II, Président du Conseil régional des chefs traditionnels des Savanes et chef canton de Korbongou.
« Notre mission sur le terrain consiste essentiellement à éveiller la population sur les contributions dans la coproduction de la sécurité », a appuyé Gbetinam Biarou, Chef du personnel du Comité Interministériel de Prévention et de Lutte contre l’Extrémisme Violent (CIPLEV/section de Tône).
Les médias de la région sont également mis à contribution pour sensibiliser les populations. Les treize médias implantés dans la région sont enrôlés dans un projet dénommé « Motaog » – financé par des partenaires financiers du Togo – pour sensibiliser les populations.
« Ces médias font passer des messages clés autour de la cohésion sociale:, surtout comment amener les populations à communiquer », a expliqué Afiwa Amelessodji, directrice du projet « Savanes Motaog ».
Par ailleurs, l’État togolais a mis en chantier, un vaste programme d’urgence de renforcement de la résilience dans la région des Savanes, estimé à près de 259 milliards de F.CFA.
Des actions sont menées, afin d’accompagner les populations pour qu’elles soient plus autonomes à créer de la richesse.
« L’une des composantes de ce programme permet de renforcer la sécurité et l’effectivité de l’action gouvernementale avec entre autres la construction de nouvelles maisons de justice, le renforcement des capacités des organisations de développement à la base et la sensibilisation à tous les niveaux sur la préservation de la paix et de la cohésion sociale. L’idée ici est de permettre au gouvernement, d’exercer l’autorité de l’État sur cette partie du territoire en vue de réaliser les objectifs visés par l’État : la paix et le bien-être des individus », a expliqué le ministre de la sécurité, le général Yark Damehame. FIN
Ambroisine MEMEDE