Quelques acteurs de l’éducation de trois pays (Côte d’Ivoire, Guinée et Togo) ont démarré ce mardi à Lomé et pour deux jours, un atelier de restitution des résultats de l’évaluation des acquis scolaires réalisés, et surtout pour dresser le bilan d’étape et promouvoir le multilinguisme dans les écoles bilingues desdits pays, a constaté une journaliste de l’agence Savoir News.
La rencontre est organisée par le ministère des Enseignements primaire, secondaire, technique et de l’artisanat du Togo en collaboration avec l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF) et la Conférence des ministres de l’Éducation des États et gouvernements de la Francophonie (CONFEMEN).
Le Programme École et langues nationales en Afrique (ELAN) est porté par l’Institut de la Francophonie pour l’éducation et la formation (IFEF), la Représentation de l’Organisation internationale de la Francophonie pour l’Afrique de l’Ouest (REPAO), le Programme d’analyse des systèmes éducatifs (PASEC) de la Conférence des ministres de l’Éducation des États et gouvernements de la Francophonie (CONFEMEN).
Le programme ELAN-Afrique (Ecole et langues nationales en Afrique) est un programme de l’Institut de la Francophonie pour l’Éducation et la Formation (IFEF) qui est lui-même un organe subsidiaire de l’OIF. La finalité de ELAN est d’améliorer les enseignements apprentissages des fondamentaux tels que lire, écrire et calculer à travers une meilleure maîtrise du français par les élèves du primaire en commençant par leur enseigner dans leur langue maternelle.
« Les évaluations des acquis scolaires des élèves faites au cours de la dernière décennie nous ont interpellés et nous ont poussés à chercher l’innovation dans les pratiques de classe, afin d’améliorer la qualité des enseignements-apprentissages et les performances de nos enfants. Le rapport d’évaluation PASEC 2014 et celui de 2019 font en effet état de niveaux insuffisants en lecture-écriture et en calcul dans la plupart des pays concernés. Le rapport PASEC 2019 conclut que plus de 55% des élèves en début de scolarité n’ont pas atteint le seuil suffisant de l’échelle de compétences en langue. En fin de scolarité, quasiment la même proportion d’élèves (52%) est en dessous du seuil suffisant de compétences et donc en difficulté d’apprentissage en lecture », a expliqué Mme Mona Laroussi (Directrice de la Francophonie pour l’éducation et la formation/IFEF).
«Au cours de cet atelier, nous allons revenir plus en détail sur le contenu de ce rapport et également, échanger et trancher sur les recommandations faites pour améliorer la mise en œuvre de l’enseignement bilingue», a-t-il indiqué.
« Les résultats qui vont nous être présentés doivent permettre de jeter les bases de la réflexion sur la suite de la phase expérimentale. La langue nationale est là pour qu’on apprenne mieux et qu’on communique mieux. C’est une culture que nous portons avec nos langues. On va apprendre le français, l’anglais et toutes les langues mais on va surtout tenir compte des premiers apprentissages », a-t-elle souligné.
M. Eke Kokou Hodin (Ministre délégué, chargé de l’Enseignement Technique et de l’Artisanat) a de son côté expliqué qu’au regard des résultats de l’évaluation du PASEC 2014-2019, il ressort que plus de la moitié des apprenants ont des difficultés d’apprentissages.
Selon les estimations de l’UNESCO, 40% de la population mondiale n’ont pas accès à un enseignement dans une langue qu’ils parlent.
«Ainsi 8 enfants sur 10, surtout dans les zones rurales et semi-rurales franchissent le seuil de la porte des salles de classes sans un contact préalable avec les langues d’enseignements à partir desquels ils doivent acquérir des compétences ou les développer. Pour pallier cette difficulté, le programme ELAN à développer une alternative pédagogique, innovante basée sur la gestion de l’utilisation conjointe du français et des langues nationales afin d’offrir aux élèves la chance de commencer les premiers apprentissages dans la langue qui nous convient », a-t-il expliqué.
Dans la perspective d’amélioration de la qualité de l’éducation, il convient d’évaluer la mise en œuvre de tout ce dispositif auprès des élèves même, principaux bénéficiaires. Ce processus d’évaluation qui a donc commencé au 2ème semestre de l’année 2021, va connaître ces deux jours, son épilogue avec cet atelier de restitution des résultats à Lomé.
La publication de ces résultats permettra aux autorités éducatives des trois pays (Côte d’Ivoire, la Guinée et le Togo) de mieux orienter les politiques éducatives des pays partenaires sur l’éducation bilingue.
« Depuis plusieurs décennies, l’UNESCO et d’autres partenaires comme l’OIF/IFEF et la CONFEMEN travaillent à promouvoir l’éducation multilingue et l’utilisation des langues nationales dans les premières années d’apprentissage à travers des projets pilotes qui ont tous convergé à conclure que lorsque un enfant commence l’école dans la langue qu’il parle avec sa mère, il a de très bons résultats pour le reste de son cursus scolaire y compris dans la maîtrise des langues qui sont le français et l’anglais. Les langues nationales, comme le éwé, kabiyé, malinké, soussou, peul, dioula, baoulé,… doivent être davantage valorisées pour sous-tendre cette quête de plus de considération pour les cultures africaines dans les programmes scolaires », a souligné M. Yao Ydo (Directeur du Bureau International de l’Éducation de l’UNESCO).
Depuis six ans, le Togo a, comme les autres pays, bénéficié de divers accompagnements en termes de renforcement de capacités des acteurs, élaboration des documents d’orientation, production d’outils didactiques et pédagogiques pour les différents acteurs.
Pour renforcer les conclusions de cet atelier, un symposium suivra les 21, 22 et 23 juillet toujours à Lomé. Il permettra de mettre plus le focus sur le Togo et fera le bilan de l’expérimentation, afin d’ouvrir des perspectives pour l’enseignement bilingue au niveau national.
Notons que le Togo a adhéré en 2016 au Programme École et langues nationales (ELAN) en Afrique. Il a positionné deux de ses langues nationales (Ewé et le Kabyè), alors que les autres pays comme la Côte d’Ivoire et la Guinée ont mis en jeu que les langues Dioula et Sosso respectivement. FIN
Bernadette AYIBE