Un hélicoptère de l’armée malienne a récemment tiré plusieurs roquettes « à proximité » de Casques bleus britanniques, ont indiqué mardi Londres et l’ONU, un incident sans précédent depuis le déploiement récent d' »instructeurs » russes au Mali qui alimente les interrogations sur l’avenir de la mission Minusma dans ce pays.
Il s’agit du premier incident de ce type révélé entre le Mali, aidé depuis peu par des forces russes, et des Casques bleus, a affirmé à l’AFP à New York une source onusienne réclamant l’anonymat.
« Nous sommes informés d’un incident récent au Mali dans lequel des roquettes ont été tirées par un hélicoptère des forces armées maliennes à proximité d’un détachement britannique », a déclaré à Londres un porte-parole du ministère de la Défense dans un message à l’AFP.
« Tout le personnel britannique est sain et sauf et les circonstances de l’incident font l’objet d’une enquête », a-t-il ajouté.
Les faits ont eu lieu près de Tessit, près de Gao, dans l’est du pays. Selon un document de source diplomatique consulté par l’AFP, l’armée malienne a procédé à partir de son hélicoptère à des tirs d’intimidation de six roquettes.
Le document dit que presque tous les hélicoptères maliens sont pilotés par des Russes assistés de co-pilotes maliens.
Le texte s’interroge sur le maintien de plusieurs contingents de la Minusma si l’implication de Russes est avérée dans ces tirs.
« Il y a quelques semaines, des troupes de maintien de la paix du Royaume-Uni ont essuyé des tirs et cet incident fait l’objet d’une enquête », a confirmé à New York le porte-parole de l’ONU, Stéphane Dujarric, lors de son point-presse quotidien.
« Il s’agit d’un événement qui a eu lieu le 22 mars », a-t-il ajouté, en parlant « de coups de feu tirés par un hélicoptère des forces armées maliennes dans la zone de Tessit, à proximité d’un détachement de la Minusma ».
« Il n’y a pas eu de blessés, les Casques bleus étaient en sécurité à tous points de vue », a-t-il assuré.
– « Accès aérien » –
A la question d’une éventuelle implication dans cet évènement de paramilitaires de la société russe Wagner, le porte-parole a indiqué ne pas savoir.
Bamako dément toute présence de mercenaires du groupe Wagner sur son sol, ne reconnaissant qu’une assistance d' »instructeurs russes » en application d’un accord de coopération bilatéral remontant aux années 60.
Ces derniers mois, plusieurs pays occidentaux ont critiqué le déploiement de plusieurs centaines de paramilitaires de Wagner au Mali en parallèle du retrait de troupes françaises et européennes de ce pays décidé en début d’année et toujours en cours.
La semaine dernière, l’ambassadeur adjoint américain à l’ONU Richard Mills, sans citer le Royaume-Uni, avait dénoncé un incident « inacceptable » ayant eu lieu le 22 mars dans lequel un hélicoptère malien avait « tiré six roquettes près de soldats de la paix dans l’est du Mali ».
Selon un diplomate s’exprimant sous couvert de l’anonymat, des paramilitaires de Wagner pourraient être impliqués dans l’incident au côté de l’armée malienne.
L’armée malienne a été accusée du massacre fin mars de centaines de civils à Moura (centre) avec la participation de mercenaires présumés de Wagner. Bamako a démenti ce massacre, assurant avoir neutralisé des jihadistes.
Les autorités maliennes ont annoncé l’ouverture d’une enquête. La Russie en fin de semaine dernière a félicité Bamako pour une opération ayant permis, selon Moscou, de neutraliser des jihadistes à Moura. Mardi, Stéphane Dujarric a souligné que l’enquête de l’ONU sur les évènements de Moura devait « se poursuivre sur le terrain afin d’établir les faits ».
« A cet égard, une équipe de la Minusma a été pré-déployée à Mopti et se tient prête » à se rendre à Moura dès que les autorités maliennes donneront « un accès aérien à la zone », a-t-il ajouté, semblant ainsi admettre implicitement une absence de liberté de mouvement des Casques bleus malgré le mandat qui leur a été confié par le Conseil de sécurité de l’ONU.
La Minusma comprend quelque 14.000 militaires et policiers. Rédigé par la France, son mandat arrive à échéance en juin.
Plusieurs pays contributeurs de troupes ont entrepris de réexaminer leur participation à cette opération de paix au vu des derniers développements survenus au Mali.
SOURCE : AFP