Aujourd’hui, grâce au digital, l’Afrique est le deuxième marché bancaire à l’échelle mondiale en termes de croissance et de rentabilité.
Les expressions banque digitale et banque en ligne sont souvent utilisées, à tort, de façon interchangeable. En effet, toutes deux désignent des alternatives online aux établissements physiques traditionnels. Mais contrairement à une simple banque en ligne, une banque digitale, en plus d’être présente en ligne, permet d’effectuer pratiquement tous les types d’opérations bancaires quotidiennes de façon totalement dématérialisée et autonome d’un point de vue client.
Autrement dit, les services sont accessibles via les terminaux digitaux (PC, smartphone, tablette, etc.) partout, à tout moment et à la demande. La banque digitale se veut aussi plus « mobile » afin d’offrir des fonctionnalités simplifiées, riches, intuitives et centrées autour des besoins clients.
Alors que les banques traditionnelles sont encore peu adoptées par la population, l’Afrique s’appuie de plus en plus sur des offres digitales et mobiles. Le très faible nombre d’agences – on en compte 5 pour 100 000 habitants en Afrique, contre 13 pour 100 000 habitants dans les pays émergents d’Asie – explique en partie l’explosion du phénomène digital banking.
La révolution digitale a débuté avec l’introduction du mobile banking par les opérateurs télécoms tels que Vodafone au Kenya via son système m-pesa qui ont rapidement distancé les banques.
Dans un monde jusque-là très peu bancarisé, 70 % des adultes en Afrique subsaharienne ne possèdent toujours pas de compte en banque, les opérateurs télécoms mobile (OTM) ont su utiliser leur proximité avec le client et capitaliser sur les terminaux mobiles, qu’il s’agisse de téléphones basiques appelés «Feature phones» utilisant le protocole USSD ou de smartphones, pour proposer tout un panel de services mobiles bancaires.
Les usages du mobile money ont évolué, passant des opérations transactionnelles (cash in et cash out, paiement de factures, versement de salaires, transferts de banque à mobile…) à des services financiers avancés impliquant tout un écosystème (assurance, microfinance, etc.) et supportés par une digitalisation de plus en plus développée. Aujourd’hui on compte en Afrique à peu près 346 millions de comptes de mobile money enregistrés contre 120 millions de comptes bancaires.
En suivant l’exemple donné par les opérateurs télécoms, les banques ont tout intérêt à tirer profit de l’essor du digital dans les services financiers. En effet, cette nouvelle approche de la banque par les paiements semble à même de transformer profondément le métier des banques. Le digital banking permet une dématérialisation de l’ensemble des services bancaires « classiques » (i.e. consultation, virements, téléchargement de RIB, commande de chéquier ou gestion d’épargne en ligne). Cette dématérialisation a un triple objectif : faciliter les démarches clients, conquérir de nouveaux clients et réduire les coûts de gestion des banques.
Les banques ont d’autant plus compris l’avantage d’investir dans la digitalisation qu’elles doivent faire face à l’émergence d’une nouvelle catégorie de clients plus avertis, plus exigeants et moins enclins à supporter le paternalisme bureaucratique.
En parallèle, l’essor de concurrents multiples tels que les OTMs et les fintechs bouleversent le marché bancaire institutionnel depuis plusieurs années. Les Fintechs, nouveaux acteurs innovants, imposent aux établissements bancaires une nouvelle forme de concurrence dans un marché où la compétition est déjà forte. En effet, les banques font déjà face aux OTMs et aux entreprises spécialisées dans le transfert d’argent et dans le paiement. Ces concurrents occupent aujourd’hui une part de marché importante à travers leurs offres innovantes mobile money de transfert d’argent et de paiement mobile. Cette place prédominante n’aurait pu avoir lieu sans l’important travail de sensibilisation et de pédagogie auprès des populations, notamment peu bancarisées, sensibilisées aux avantages de l’argent dématérialisé par rapport à un compte en banque traditionnel.
L’évolution de l’environnement technologique a aussi un fort impact sur les banques. Le développement de la 3G et l’explosion du nombre de smartphones en Afrique (l’adoption des smartphones devrait augmenter à 463 millions d’ici 2020, soit une croissance de 167 millions par rapport à la fin de l’année 2016 – selon GSMA) ouvrent de nouvelles perspectives et démocratisent l’accès aux services bancaires. Les clients finaux en Afrique n’ont pas les mêmes appréhensions que les clients européens vis-à-vis de la banque et sont beaucoup moins conservateurs à l’égard des produits bancaires.
Face aux innovations des opérateurs et des nouveaux acteurs, et dans un contexte de marché en ébullition, les banques traditionnelles doivent s’adapter pour rester compétitives. La transformation digitale et l’évolution des « business Model » doivent être au cœur des objectifs des banques dans les années à venir. C’est avec l’objectif d’accompagner ces dernières dans l’ère du digital que BearingPoint a réalisé cette étude.
Jean-Michel Huet/Ferid Chakroun