Mgr Philippe Fanoko Kpodzro ne vit plus à Accra (Ghana) depuis quelques jours. Selon les responsables de la Dynamique Mgr Kpodzro (DMK, opposition), l’archevêque émérite de Lomé (91 ans) a été exfiltré d’Accra à Stockholm (Suède) par le Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR).
« Je confirme l’exfiltration de Mgr Kpodzro et de son assistant », avait affirmé sur des médias, Mme Brigitte Adjamagbo-Johnson (coordinatrice de la DMK) ».
« On a constaté que c’est après sa lettre ouverte au président Macron que c’est intervenu. Il y a certainement un lien », avait-elle ajouté.
L’information qui a été abondamment relayée sur les réseaux sociaux, fait l’objet de divers commentaires.
« Ni les autorités ghanéennes, ni les responsables du HCR aient jamais utilisé le mot +exfiltration+. Je ne suis pas certain », a réagi Gilbert Bawara (ministre de la fonction publique) sur radio Victoire Fm.
« Quand on connaît un peu le droit international humanitaire et la pratique du HCR, on sait que, pour faire l’objet d’une réinstallation dans un autre pays, il y a deux possibilités : soit quand on a été admis comme demandeur d’asile ou même qu’on a bénéficié du statut de réfugié dans un pays, on est astreint à un certain nombre de règles en termes de comportements, de déclarations… Si ces règles et obligations auxquelles vous souscrivez ne sont pas respectées, il est possible que le pays d’accueil lui-même manifeste sa désapprobation, mais il est aussi possible que les personnes concernées elles-mêmes fassent la requête de réinstallation dans un autre pays. En l’espèce, il n’y a que les deux possibilités qui peuvent se produire, aucune autre hypothèse n’est possible, parce que nous connaissons parfaitement les pratiques et les règles du HCR », a-t-il longuement expliqué.
« Dans nos sociétés, qu’est-ce qu’on peut espérer pour un nonagénaire, un homme ou une femme de cet âge ? Qu’il soit dans son milieu naturel, qu’il se réveille après des siens, qu’il puisse se balader notamment dans les rues de Lomé tranquillement. En avril 2020, s’il y avait une raison d’inquiéter l’Archevêque émérite, il aurait été inquiété. Il a été accompagné tranquillement à sa résidence. A un moment donné, pour des raisons qui lui sont propres, il a décidé de partir, de demander asile à l’étranger. Donc, le Togo n’a strictement rien à voir avec sa situation. A ma connaissance, il n’y a jamais eu de procédures administrative, judiciaire ou policière à l’encontre l’Archevêque émérite. S’il y en a jamais eu, c’est qu’il n’y en aura pas », a précisé M.Bawara.
‘Pas de droit et de liberté sans limite’
Le ministre a également abordé l’affaire Djimon Oré, président du Front des Patriotes pour la Démocratie (FPD/ opposition) et ancien ministre de la communication, arrêté le 29 avril à son domicile et gardé au Service Central de Recherches et d’Investigations Criminelles (SCRIC) pour des propos diffamatoires sur un média à l’occasion de la célébration mardi dernier, du 61è anniversaire de l’indépendance du Togo.
« Le bilan en termes de sang versé, en termes de compatriotes togolais assassinés par la France-Afrique à travers le régime barbare, le régime de l’oligarchie militaro clanique des Gnassingbé, le bilan c’est que le nombre d’assassinés au Togo dépasse de loin le nombre de ceux qui sont tombés au Rwanda et on parle de génocide rwandais. S’il faut faire de comparaison : c’est ça le bilan de l’indépendance du Togo de 1961 à nos jours », avait fortement critiqué M. Oré sur un média de la diaspora.
Il serait accusé d’atteinte à l’honneur, de tentative de troubles aggravés à l’ordre public et d’outrages envers les représentants de l’autorité publique.
Plusieurs partis de l’opposition et responsables de la société civile, sont montés au créneau pour exiger sa libération.
« Je ne vais pas commenter en tant que tel, un cas qui est encore pendant devant la justice. J’ai lu et entendu ici et là des gens parler de liberté d’opinion, de liberté d’expression. Vous savez, il n’y a pas de droit et de liberté sans limite. Et ces limites, c’est ce que d’autres lois prévoient », a souligné M.Bawara.
Ce dernier s’est demandé si tout ce que dénonce l’opposant existait avant qu’il ne fut ministre ou c’est un constat fait après son passage au gouvernement.
Si c’est un constat fait après son passage au gouvernement, « cela signifie qu’il manque de repère et de valeur », a indiqué le ministre Bawara.
« Si le code pénal a prévu des infractions en manière de calomnie, de diffamation, cela signifie qu’en la matière, la liberté d’opinion et d’expression ne sont pas sans borne », a-t-il poursuivi.
« Si vous tenez des propos qui sont en infraction avec les lois, vous devez répondre devant la justice. C’est une question de principe général. On induit la population en erreur en donnant le sentiment que liberté d’opinion et d’expression seraient des libertés sans borne et sans limite. Parfois, il faut faire attention. Je pense que, quand on tient des propos, il faut mesurer la portée de ces propos. Pour mon premier poste au sein des Nations unies, j’ai été déployé au Rwanda, pays qui a subi un incroyable génocide. Alors quand on utilise certains mots, il faut faire preuve de responsabilité », a-t-il rappelé.
‘Nous sommes des pays voisins, nous sommes des pays frères, nous sommes condamnés à travailler ensemble…’
M.Bawara a également avancé quelques phrases, suite à la question de savoir si le Togo se sent concerné par la récente sortie du président Talon qui accuse les pays voisins de vouloir déstabiliser le Bénin.
« Si vous allez actuellement, à la frontière entre le Togo et le Bénin, que vous alliez le matin ou que vous alliez à minuit, vous allez voir qu’il y a un bouillonnement de Togolais et de Béninois, il y a un brassage. La frontière est ouverte 24 heures sur 24. Donc, c’est le plus important. Nous sommes des pays voisins, nous sommes des pays frères, nous sommes condamnés à travailler ensemble pour maintenir et consolider la paix à l’intérieur de nos Etats, mais également sur le plan sous régional. Nous avons des défis communs en matière de développement économique et social. C’est ça qui est le plus important et qui doit mobiliser à la fois, les peuples et les dirigeants », a-t-il précisé.
Et pour finir, un petit commentaire « amusant » sur l’ancien Premier ministre Agbéyomé Kodjo qui vit en exil.
« Il est dans un champ de maïs… c’est quelqu’un qui s’était senti à l’aise lorsqu’il était au RPT dont l’emblème était le maïs. Il cherche à retrouver ses filiations », a ajouté M. Bawara. FIN
Junior AUREL