La police tchadienne a dispersé à coups de gaz lacrymogène quelques manifestations sporadiques de dizaines de personnes, blessant par balle l’une d’elle, qui avait répondu à l’appel de l’opposition et de la société civile à N’Djamena contre la junte qui a pris le pouvoir après la mort du président Idriss Déby Itno.
Les autorités militaires ont interdit vendredi les rassemblements prévus par Wakit Tama, une coalition de partis d’opposition et de représentants de la société civile, qui avait appelé à manifester contre le Conseil militaire de transition (CMT), dirigé par le fils d’Idriss Déby, Mahamat Idriss Déby, qui concentre presque tous les pouvoirs.
« Une vingtaine de personnes ont été interpellées par les forces de l’ordre et une seule personne blessée par balle réelle », a déclaré à l’AFP Youssouf Tom, le procureur de N’Djamena.
« Le policier auteur du tir a agi sous l’effet de la drogue et a finalement été arrêté et sera jugé pour répondre de ses actes », a-t-il poursuivi.
Dans le 6e arrondissement de N’Djamena, dans le sud de la capitale, la police a fait usage dans la matinée de gaz lacrymogène pour disperser une tentative de rassemblement sur la place Fest Africa, ont constaté des journalistes de l’AFP. Les forces de l’ordre ont été massivement déployées dans les rues de la capitale. Les rassemblements ont été rapidement dispersés par la police dans la matinée. Quelques pneus ont été brûlés dans les rues.
« Il y a eu une quinzaine d’interpellation et une dizaine de blessés, dont trois cas graves », a déclaré de son côté à l’AFP Max Loalngar, le coordinateur de Wakit Tama.
« Le CMT a démontré sa mauvaise foi et sa posture de guerre alors que nous demandions un dialogue inclusif pour permettre à tous les Tchadiens sans exclusion de rechercher les moyens d’une sortie de crise honorable pour le Tchad », a-t-il conclu.
– Drapeaux français brûlés –
Un petit groupe de manifestants a brûlé des drapeaux de fortune censés représentés le drapeau français, dans le 5e arrondissement, dans le nord de la capitale.
La France est accusée par une partie de l’opposition de soutenir le nouveau pouvoir depuis que le président Emmanuel Macron est venu à N’Djamena rencontrer les nouvelles autorités à l’occasion des funérailles du maréchal Déby, seul chef d’État occidental à avoir fait le déplacement.
Le Tchad est un allié précieux de la France dans la lutte contre le jihadisme au Sahel. Son armée, considérée comme la plus solide de la région, est aux côtés de la force française Barkhane dont le QG est installé à N’Djamena.
« Oui à un pouvoir civil », ont écrit sur une pancarte des manifestants.
Depuis la mort du président Déby, Mahamat Idriss Déby a dissous l’Assemblée nationale et s’est arrogé le titre de président de la République.
Le nouvel homme fort du pays est entouré de 14 généraux, tous fidèles à son père. Il a promis des élections « libres et démocratiques » d’ici 18 mois, période qui peut être prorogée une fois.
Le 27 avril, six personnes ont été tuées à N’Djamena et dans le sud du Tchad, selon les autorités, neuf selon une ONG locale, au cours de manifestations, interdites par les autorités, à l’appel de l’opposition et de la société civile. Plus de 600 personnes ont été arrêtées.
Le président français Emmanuel Macron avait alors condamné les violences au Tchad.La junte a constitué dimanche par décret un gouvernement de transition composé de 40 ministres et secrétaires d’État.
Les postes régaliens sont presque tous aux mains de membres du Mouvement patriotique du salut (MPS), le parti d’Idriss Déby.
Deux membres du parti de l’opposant historique au maréchal Déby, Saleh Kebzabo, ont fait leur entrée dans le gouvernement de transition. Le parti de M. Kebzabo s’est depuis retiré du collectif Wakit Tama.
« Notre parti s’est retiré et n’appelle pas à manifester samedi », a déclaré jeudi à l’AFP Saleh Kebzabo.
SOURCE : AFP