Un peu d’histoire
Depuis plusieurs années, la presse écrite vit une crise unanimement observée, cependant ce n’est pas la première fois qu’elle doit se réinventer.
L’âge d’or de la presse écrite date de la fin du XIXe et du début du XXe siècle, où des millions de journaux étaient vendus chaque jour.
La deuxième partie du XXe siècle voit la vente de journaux diminuer petit à petit notamment avec la concurrence de la radio puis de la télévision comme source d’information. Le déclin de la presse papier a débuté avant l’arrivée d’internet.
Au départ, Internet accélère la crise de la presse
L’arrivée d’internet dans les années 2000 est au départ observée avec crainte, mais vue aussi comme une chance pour les médias alors que ceux-ci déclinent presque tous depuis quelques années déjà.
Des journaux, comme Libération en France, publient sur leur site en ligne l’intégralité de leurs pages gratuitement la veille de parution papier.
Au départ, la plupart des médias pense que la publicité en ligne va financer cet accès libre.
Cependant, ils se rendent très vite comptent que la publicité ne le permet pas. La principale source de revenus des journaux restaient alors la vente du papier journal.
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Internet apporte donc une information gratuite sur les sites web au consommateur qui n’est plus disposé à payer pour l’obtenir. Cet effet est renforcé avec l’arrivée en masse de journaux gratuits et des réseaux sociaux.
De plus, les médias ne sont plus en concurrence seulement entre eux, mais doivent faire face à de nouvelles sources de divertissement comme les applications d’un smartphone avec ses jeux, ses réseaux sociaux…
L’érosion des ventes papier a fait sombrer bon nombre de journaux en France : France Soir, La Tribune (version print) et dans les pays occidentaux l’hémorragie a été grande avec de nombreux plans de restructuration. Au départ, internet a donc accéléré la chute de la presse écrite alors que l’inverse était escompté.
Une nouvelle réflexion sur l’offre : le passage au freemium
Les grands journaux internationaux et français se sont alors penchés sur l’offre numérique pour la rendre plus adaptée à la demande. En France, les exemples les plus marquants sont l’Equipe, Le Figaro et Le Monde. La réflexion a porté sur la méthode pour adapter un journal papier à un autre type de lecture parfois furtive sur un smartphone.
Dans les faits, des abonnements numériques incitatifs et abordables sont développés avec les offres freemium (une dizaine d’euros par mois) : quelques articles d’actualité générale sont gratuits mais la plupart des contenus à forte valeur ajoutée restent uniquement accessibles en payant.
La grande majorité des journaux applique cette logique à présent. Parfois, il est également possible d’avoir accès gratuitement à quelques articles par mois puis il faut payer pour lire les autres. Internet a considérablement changé la façon de vendre des médias mais aussi la façon de travailler des journalistes.
Ce travail sur l’offre s’est couplé à une ergonomie renforcée avec des sites internet refaits à neuf et une évolution des contenus.
Il n‘est plus question pour les médias de reproduire exactement le même contenu du print au web, il faut adapter le contenu à chaque type de lecture.
On peut remarquer cette évolution avec les différentes séries d’articles du Monde sur un même sujet, les contenus digitaux L’Equipe Explore du quotidien sportif ou l’apparition de vidéos et de podcasts un peu partout.
Le président du directoire du Monde Louis Dreyfus expliquait en 2018 cet effort sur la production journalistique : «C’est par la qualité de nos contenus, de sa richesse et de sa diversité qu’on va retrouver la place qui doit être celle du Monde. Donc on a augmenté de 30% les effectifs de la rédaction ce qui est assez atypique quand on compare avec nos confrères».
Ces investissements dans le numérique ont permis d’inverser la courbe baissière des ventes ces dernières années.
Au niveau international, le New York Times est le quotidien avec le plus d’abonnés : environ 3,5 millions « pur web ». Vous trouverez un classement ici.
Plus d’abonnés numériques que papier au Monde depuis 2018
Pour Louis Dreyfus, c’est une réussite : « Il y a dix ans, il était commun de penser que les quotidiens allaient mourir tués par internet. La presse quotidienne de qualité, c’est-à-dire le New York Times, ou en France le Figaro et le Monde a commencé à construire un modèle économique très important. On a une croissance de 44% des abonnés numériques en 2017. » Même, pour la première fois en 2018, les abonnements numériques sont plus importants que les abonnements papier en nombre alors qu’ils coûtent moins chers à produire. La rentabilité est donc plus forte.
Un succès encore restreint
Si certains grands médias de presse quotidienne nationale (PQN), déjà ancrés dans le paysage médiatique français s’en sortent, ce n’est pas le cas pour tout le monde. La presse magazine (hebdomadaire notamment) et la presse quotidienne régionale (PQR) ont plus de mal à se moderniser. La presse locale encore très forte dans certaines régions n’a été touchée que dans un second temps par l’arrivée d’internet. Premièrement, l’actualité locale intéresse encore beaucoup les populations et la proximité que le journal entretient avec les habitants est plus forte qu’avec la presse nationale.
Cependant, la presse locale est à présent traversée par des baisses de vente et les plans de départ se multiplient comme à Ouest France (journal qui vend le plus de journaux en France, environ 650 000 par jour).
De plus, le lectorat local est plus âgé et l’attrait des jeunes générations pour ces informations locales est un enjeu central.
Pour se réinventer, cette presse aussi fait le pari du freemium tout en s’attachant à produire des contenus plus en phase avec les attentes des lecteurs. A savoir si la recette aura autant de succès que pour la presse nationale…
Par Antoine Matta