Le trafic entre la ville rwandaise de Gisenyi et celle de Goma en République démocratique du Congo, où quatre cas d’Ebola ont été enregistrés, a baissé de manière drastique jeudi et vendredi, après les restrictions imposées par les autorités rwandaises à leurs ressortissants.
« Généralement, 60.000 personnes en moyenne font des navettes entre le Rwanda et la RDC ici à la petite barrière de Goma.Depuis le début de la semaine, nous enregistrons moins de dix mille traversées, une baisse considérable à cause d’Ebola », a déclaré à l’AFP, un officier de l’immigration congolaise, sous anonymat.
A la frontière entre Goma (RDC) et Gisenyi (Rwanda), une dizaine de personnes se relayaient sans bousculades pour prendre leurs laissez-passer, ce précieux sésame qui permet aux Congolais de traverser la frontière.
Il était plus facile aux Congolais de sortir de leur pays qu’à leurs voisins rwandais de faire le mouvement contraire, a constaté une équipe de l’AFP qui n’a pu se rendre au Rwanda en raison de nombreuses formalités.
« La frontière n’est pas fermée.Mais le Rwanda empêche ses ressortissants de passer au Congo sans motif valable », explique un responsable qui travaille pour le compte de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) au point de contrôle frontalier dans le cadre de la riposte contre Ebola en RDC.
« J’ai pu traverser parce-que je suis détenteur d’une carte de service de vendeur de téléphone à Goma.Sinon, l’immigration n’allait pas m’autoriser de quitter le Rwanda.Des centaines de Rwandais sont empêchés de franchir la frontière », a affirmé Martin Sibomana, un ressortissant rwandais.
« L’immigration rwandaise demande votre profession, la carte d’identité et beaucoup d’autres formalités et justifications qui n’existaient pas avant.S’ils ne sont pas satisfaits, ils vous refoulent », a témoigné, agacé, Franck Paluku, à la barrière.Ce manutentionnaire congolais, affirme avoir été renvoyé vendredi par les services d’immigration du Rwanda.
Habillés en uniformes noirs et portant des gants blancs, des officiers d’immigration congolaise, armés, contrôlent le contenu des sacs des voyageurs tandis que des agents de la riposte prélèvent systématiquement la température des passants à l’aide de thermoflash.
– ‘Durcissement des conditions’ –
Sans ménagement, un homme âgé a été reconduit en RDC alors qu’elle tentait de traverser.Par contre, des personnes vivant avec handicap, assis sur leurs tricycles adaptés au transport des bagages passaient sans être contrôlés.
Des Congolais qui ont pu entrer et revenir du Rwanda vendredi se demandaient si la propagation d’Ebola est la seule cause de ce durcissement des conditions de la traversée.
« Je me demande s’il n’y a pas d’autres raisons, notamment politique » derrière l’attitude des autorités rwandaises, a dit M. Paluku.
Déclarée en août dernier, l’épidémie d’Ebola est contenue jusque-là dans la province du Nord-Kivu (Beni, Butembo-Katwa) et marginalement dans celle de l’Ituri.Mi-juillet, un premier cas d’Ebola a été détecté dans la ville de Goma, à la frontière avec le Rwanda.
L’organisation mondiale de la santé (OMS) avait alors placé au rang d' »urgence de santé publique de portée internationale ».Depuis, quatre cas confirmés dont deux morts ont été enregistrés à Goma.
Le 1er aout, les autorités rwandaises ont fermé la frontière pendant plus de huit heures, sans explication après le deuxième décès d’Ebola à Goma.Mardi, les ministres congolais et rwandais de la Santé ont décidé de renforcer leur collaboration dans la lutte contre l’épidémie qui a déjà fait plus de 1.820 morts.
Jusque-là, aucun cas d’Ebola n’a été signalé au Rwanda, alors qu’en juin, deux cas en provenance de la RDC ont été détectés en Ouganda voisin.
La RDC et le Rwanda entretiennent des relations en dents de scie depuis 25 ans. La RDC accuse son petit voisin de soutenir des groupes armés qui déstabilisent l’est congolais depuis un quart de siècle.
SOURCE : AFP