Diffa, la grande ville du sud-est du Niger, a été frappé de mardi soir à mercredi matin par une nouvelle attaque d’envergure du groupe jihadiste nigérian Boko Haram, dont les violences vont crescendo dans cette région depuis fin 2018.
Des assaillants en nombre indéterminé ont attaqué mardi soir la caserne centrale de la gendarmerie de cette ville de 200.000 habitants, située à quelques kilomètres de la frontière du Nigeria, berceau de Boko Haram.
Après plusieurs heures de combat avec les forces de sécurité nigériennes, des assaillants, vraisemblablement munis de ceintures d’explosifs, se sont retranchés au domicile d’un gendarme où ils ont pris des otages et se sont ensuite fait sauter, selon le secrétaire général du gouvernorat de Diffa, Yahaya Godi, et d’autres sources.
Le bilan total était encore inconnu mercredi après-midi.
« Nous n’avons pas encore de bilan définitif mais un bilan provisoire fait état de deux de nos éléments tombés (tués), et de l’autre côté (Boko Haram), nos forces en ont tué deux et récupéré leur arsenal », a déclaré à l’AFP Yahaya Godi.
L’attaque a été revendiquée mercredi par le groupe Etat islamique en Afrique de l’Ouest (ISWAP en anglais), une faction de Boko Haram, d’après SITE, un centre américain spécialisé dans la surveillance en ligne de la mouvance jihadiste.
Le groupe fait état d’un commando de « quatre » kamikazes, qui aurait « tué et blessé des dizaines » de soldats nigériens, selon son communiqué de revendication.
D’après un haut responsable local, s’exprimant sous couvert d’anonymat, « des éléments armés de Boko Haram ont réussi à infiltrer la ville » vers 21H30 (20H30 GMT) mardi soir.
Des « tirs » et de « fortes détonations » ont alors été entendus à la gendarmerie, selon des habitants.
« Au niveau du groupement de la gendarmerie nationale de Diffa (on entend) des tirs et de très fortes explosions à l’instant même », avait rapporté dès le début de l’attaque un habitant sur sa page Facebook.
Un élu local, requérant l’anonymat, a rapporté que les assaillants ont ciblé « plusieurs endroits », sans plus de précision.
– Écoles et marchés fermés –
« Ils ont attaqué principalement le groupement de la gendarmerie », où « la fusillade s’est poursuivie jusqu »à 04H00 » du matin, a indiqué Yahaya Godi.
« Traqués par les forces de sécurité, les assaillants se sont retranchés au domicile d’un gendarme et ont pris en otage plusieurs personnes », selon le haut responsable local, d’après lequel l’opération était toujours en cours à 11HOO.
Puis « deux kamikazes se sont fait exploser au domicile d’un gendarme où ils s’étaient retranchés avec des otages », a expliqué Yahaya Godi, qui n’a pas précisé si des otages ont péri dans l’explosion ou s’ils ont pu être exfiltrés.
Sans confirmer explicitement la fin de l’attaque, Yahaya Godi a affirmé que des « opérations de ratissage » se poursuivaient « pour tenter de retrouver d’éventuels assaillants ».
« Par précaution et pour ne pas exposer la vie des populations, les écoles et les marchés, qui sont des lieux de prédilection des kamikazes, resteront fermés deux ou trois jours », a-t-il aussi déclaré.
Le sud-est du Niger subit depuis quatre ans des attaques de Boko Haram. Depuis la fin de l’année dernière, la région a connu un regain de violence.
Durant le seul mois de mars 2019, 88 civils ont été tués au Niger par Boko Haram dont les attaques ont contraint plus de 18.000 personnes à fuir leurs villages, selon les Nations unies qui s’alarment de la « détérioration rapide de la situation sécuritaire » dans la zone de Diffa.
Parallèlement à l’attaque contre Diffa, le chef du village de Tam (à 70 km à l’ouest de Diffa) a été « égorgé dans la nuit de mardi à mercredi » par des « éléments du groupe terroriste Boko Haram », selon une ONG locale. Elle ajoute que deux habitants de Tam ont été enlevés par les assaillants.
Ces attaques interviennent au moment où une mission de parlementaires sillonne la région de Diffa pour « sensibiliser » les populations et les « inviter à collaborer avec l’armée » dans le cadre de la lutte contre Boko Haram, selon la radio d’Etat.
Mardi, le chef de l’État nigérien Mahamadou Issoufou a présidé une réunion du Conseil de sécurité regroupant tous les responsables civils et militaires chargés des questions sécuritaires du pays.
L’armée nigérienne multiplie les opérations aériennes et terrestres, mais ne parvient pas à contenir les assauts des jihadistes retranchés dans des zones marécageuses du lac Tchad et dans des localités nigérianes sous leur contrôle.
L’insurrection de Boko Haram (dont le nom signifie « l’école occidentale est un péché »), qui a débuté en 2009 dans le nord-est du Nigeria, a fait plus de 27.000 morts et 1,8 million de déplacés dans ce pays, et a gagné le Niger, le Tchad et le Cameroun voisins.
SOURCE : AFP