La Chine, premier partenaire commercial de l’Afrique, réunit lundi à Pékin un sommet sino-africain qui sera largement dominé par la coopération économique, à l’heure où les Chinois tentent de cimenter leur influence dans les pays en développement.
Le président chinois Xi Jinping accueillera pendant deux jours ce septième « Forum sur la coopération sino-africaine », un rendez-vous qui a lieu tous les trois ans, alternativement en Chine et en Afrique.
Parmi les invités confirmés, les présidents sud-africain Cyril Ramaphosa, le Nigérian Muhammadu Buhari, l’Egyptien Abdel Fattah al-Sissi, le togolais Faure Gnassingbé ou encore l’Ivoirien Alassane Ouattara.
Xi Jinping, en pleine guerre commerciale avec l’Amérique de Donald Trump, devrait profiter de la rencontre pour vanter « l’amitié » entre son pays et un continent où Pékin a multiplié les investissements, particulièrement dans les infrastructures, à coups de milliards de dollars
En Afrique, Pékin cherche à allonger « sa liste toujours plus longue de pays amis », particulièrement dans le nord et l’ouest francophone du continent, observe Adebusuyi Isaac Adeniran, expert à l’Université Obafemi Awolowo (Nigeria).
– Première base militaire –
A l’exception du petit eSwatini (ex-Swaziland), tous les pays d’Afrique reconnaissent désormais le régime communiste, le Burkina Faso ayant rompu cette année ses liens avec le gouvernement rival de Taïwan. Et Pékin a ouvert l’an dernier à Djibouti sa première base militaire à l’étranger
Vu du côté africain, « le besoin d’argent chinois occupera le devant de la scène » lors du forum de Pékin, prédit M. Adeniran.
L’argent, le président Xi ne demande pas mieux que d’en prêter à l’Afrique, d’ores et déjà incluse dans ses « Nouvelles routes de la soie », un projet pharaonique de construction d’infrastructures destinées à relier la deuxième économie mondiale à ses partenaires commerciaux.
« L’initiative sera probablement étendue afin d’y incorporer la totalité de l’Afrique », prévoit Cobus van Staden, spécialiste des relations Chine-Afrique à l’Institut des affaires internationales (Afrique du sud).
Lors du dernier sommet, à Johannesburg en 2015, Xi Jinping avait annoncé une enveloppe de 60 milliards de dollars en aide et en prêts à destination des pays africains.
– ‘Pas des marionnettes’ –
Les entreprises publiques chinoises, en mal de matières premières, ont aussi investi massivement dans des pays comme le Soudan du sud ou la République démocratique du Congo.
Mais les prêts chinois soulèvent des inquiétudes pour la stabilité financière de pays qui pourraient se retrouver lestés par un lourd endettement pour de longues années. A titre d’exemple, la dette publique de Djibouti a explosé de 50% à 85% du PIB en l’espace de deux ans, suscitant l’inquiétude du Fonds monétaire international (FMI) à l’égard des créances dues à Pékin.
Ailleurs, des citoyens dénoncent parfois le recours à la main-d’oeuvre chinoise et des contrats par trop favorables aux entreprise de l’empire du Milieu.
A Madagascar, des manifestants ont ainsi protesté pendant des mois en 2016 contre l’octroi pour 40 ans à une société chinoise de droits d’exploitation d’une mine d’or.
Au Kenya, une ligne de chemin de fer financée par Pékin a été critiquée pour son coût et sa construction à travers des parcs nationaux. Mais le ministre kényan des Transports vient d’annoncer qu’une nouvelle tranche du projet serait signée au sommet de Pékin, pour 3,8 milliards de dollars.
Parallèlement, la relation de la Chine avec ses partenaires africains évolue: Pékin ne voit plus seulement l’Afrique comme un marché, mais aussi comme un sous-traitant, afin de compenser la hausse de ses propres coûts de production.
« La Chine cherche à investir dans des industries à fort contenu de main-d’oeuvre à mesure qu’elle s’enrichit et vieillit », explique la sinologue Lauren Johnston, de l’Université de Melbourne.
L’influence croissante de Pékin provoque parfois des réactions vives. La semaine dernière, le président namibien Hage Geingob a renvoyé dans les cordes l’ambassadeur de Chine, qui tentait de lui expliquer ce qu’il faudrait dire lors du sommet.
« Vous n’avez pas à nous dire ce que nous devons faire », lui a-t-il répondu. « Nous ne sommes pas des marionnettes ».
SOURCE : AFP (Pékin)