Le président camerounais Paul Biya, 85 ans, au pouvoir depuis 1982, a annoncé vendredi sa candidature à un 7e mandat au lendemain de l’attaque du convoi de son ministre de la Défense en zone anglophone, déstabilisée par des séparatistes armés.
« Je serai votre candidat à la prochaine élection présidentielle », a écrit le chef de l’Etat sur son compte Twitter, se disant « conscient des défis que nous devons ensemble relever pour un Cameroun encore plus uni, stable et prospère ».
Il a affirmé que sa candidature était une réponse à des « appels incessants » de ses « compatriotes du Cameroun et de la diaspora ».
Depuis plusieurs mois, ses soutiens le présentaient comme le « candidat naturel » de la majorité et sa candidature ne faisant presque plus aucun doute.
La présidentielle, prévue le 7 octobre, va se tenir dans un contexte de violences quotidiennes dans les régions anglophones du Nord-Ouest et du Sud-Ouest qui risquent de perturber le scrutin.
L’annonce du président Biya a été faite au lendemain de l’attaque du convoi de son ministre de la Défense, Beti Assomo, par des séparatistes anglophones armés dans le Sud-Ouest. M. Assomo y avait été envoyé par le chef de l’Etat pour évaluer la situation sécuritaire.
« Le convoi du ministre a été attaqué dans la zone de Kumba », localité du Sud-Ouest, a affirmé à l’AFP une source proche des services de sécurité, la radio d’Etat parlant d’assaillants « neutralisés » (tués) et un journaliste blessé lors de l’attaque évoquant de son côté « quatre militaires » blessés.
Selon ce journaliste du quotidien d’Etat Cameroon Tribune, Grégoire Djarmaila, blessé par les éclats de verre du véhicule dans lequel il se trouvait, une première attaque s’est produite alors que le ministre se rendait à un poste avancé de l’armée à « 7 km de Kumba ».
A mi-chemin, le convoi d’une trentaine de véhicules, dont un blindé dans lequel se trouvait Beti Assomo et six généraux, a été « stoppé par une barricade érigée par des sécessionnistes » anglophones, a raconté le journaliste.
« Au même moment, nos véhicules ont été criblés de balles venant des maisons abandonnées par les populations ayant fui la guerre », a-t-il ajouté. Il a affirmé que les militaires de la délégation ont riposté « de manière appropriée » et ont ainsi permis au convoi de rallier le poste avancé de l’armée.
Une seconde attaque s’est alors produite au retour de la délégation, selon le journaliste. « A peine sortis du camp, nous avons été attaqués. Cette fois, ils donnaient l’impression d’être plus nombreux et plus déterminés », selon lui, tirant « sur tous les véhicules du convoi ».
– « 40 minutes d’enfer » –
« Notre chance a été qu’ils utilisaient des armes de chasse de fabrication artisanale », a-t-il expliqué, assurant avoir vécu « 40 minutes d’enfer ».
En dépit de ces attaques, Beti Assomo devait se rendre vendredi dans l’autre région anglophone du Nord-Ouest.
Dans ces deux régions – sur les dix que compte le Cameroun – les combats sont devenus quasi quotidiens entre militaires, policiers et des séparatistes armés.
Ces derniers affirment vouloir rétablir dans un Etat indépendant « la dignité » d’une minorité anglophone qui se sent marginalisée par le pouvoir central, essentiellement francophone.
Depuis fin 2017, ces séparatistes, éparpillés en divers groupes, s’en prennent sans relâche aux forces de l’ordre et de sécurité, mais aussi aux symboles de l’administration comme les fonctionnaires, qu’ils enlèvent, et les écoles, qu’ils incendient.
Plus de 80 membres des forces de sécurité ont perdu la vie depuis le début du conflit qui a également entraîné le déplacement d’environ 195.000 Camerounais fuyant les violences, dont quelque 34.000 ont trouvé refuge au Nigeria voisin.
Ce conflit armé de plus en plus violent, dans lequel les forces armées et de sécurité sont accusés par des défenseurs des droits de l’Homme d’exactions graves, devrait largement dominer la campagne électorale.
Avant le président Biya, d’autres candidats à la présidentielle se sont déja déclarés, parmi lesquels Joshua Osih, du Social democratic Front (SDF), principal parti d’opposition, l’avocat et ancien vice-président de Transparency International Akere Muna, et le président du parti Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC) Maurice Kamto.
Selon l’opposition, le régime de Paul Biya porte la responsabilité du « chaos » dans les régions anglophones.
SOURCE : AFP