Nigeria : Le parti au pouvoir affirme son soutien à Buhari, sous le feu des critiques

Muhammadu Buhari

Le parti au pouvoir au Nigeria, le All Progressives Congress (APC), a assuré qu’il resterait soudé au président Muhammadu Buhari, sous le feu des critiques, en pleine course pour la présidentielle de février 2019.

Plus de 30 partis, dont le principal parti d’opposition, le Parti démocratique populaire (PDP), ont créé lundi une alliance pour faire front contre la candidature du chef de l’Etat de 75 ans à sa propre succession.

La semaine dernière, c’est au sein même de l’APC que les fractures ont été mises au grand jour. Des parlementaires du parti au pouvoir ont annoncé la création d’un mouvement contestataire, l’APC réformé (rAPC), dénonçant « la catastrophe monumentale » qu’a été la présidence Buhari depuis 2015, selon eux.

Mais pour le porte-parole de l’APC, Bolaji Abdullahi, ces deux développements n’auront aucun effet sur la campagne électorale. « Ils peuvent se liguer contre nous, mais cela ne fera en aucun cas renoncer notre gouvernement à réaliser les promesses faites aux Nigérians: débarrasser notre pays de la corruption et améliorer le quotidien de notre peuple ».

Muhammadu Buhari est devenu en 2015 le premier candidat de l’opposition à vaincre un président en exercice dans l’histoire du Nigeria.

 

– Déçu –

 

Mais après une grande vague d’optimisme qui s’était emparée du géant de 180 millions d’habitants, M. Buhari a déçu ne parvenant pas à mettre un point final à l’insurrection jihadiste de Boko Haram, ni à endiguer les vagues de violences qui surgissent aux quatre coins du pays.

Il a été vivement critiqué aussi pour ne pas avoir sorti le Nigeria de la pire récession de son histoire plus rapidement, et pour mener une lutte anticorruption. Certains considèrent cette lutte comme une « chasse aux sorcières » contre ses opposants politiques.

L’ancien général, qui avait déjà exercé le pouvoir dans les années 1980 pendant les dictatures militaires, a également passé de nombreux mois à Londres pendant son mandat pour raisons de santé, et beaucoup mettent en doute ses capacités à diriger le pays pour quatre ans de plus.

Pour le politologue nigérian, Chris Ngwodo, l’émergence d’un mouvement de contestation au sein du parti présidentiel ne surprend guère.

Cela rappelle d’ailleurs la création même de l’APC en amont du vote de 2015, lorsque de nombreux hommes politiques s’étaient alliés pour « capitaliser sur le mécontentement général contre le régime de Jonathan Goodluck » (PDP).

 

– Politiques d’alliances –

 

« Si l’opposition peut mettre de l’ordre dans sa maison et mener des primaires libres et équitables, le candidat choisi sera acceptable », explique M. Ngwodo à l’AFP.

« Mais si c’est la même vieille histoire de politique d’alliances par défaut, cette coalition sera morte dans l’oeuf », prévient-il.

Abubakar Sadiq, professeur de sciences politiques à l’Université Ahmadu Bello, à Zaria, dans le nord du pays, craint que de nombreux partis de la nouvelle coalition de l’opposition soient trop petits pour pouvoir peser dans la balance.

Selon lui, au sein du PDP, le candidat déjà en lice qui a le plus de chance de remporter les primaires est « seulement (l’ancien vice-président) Atiku Abubakar, qui a les moyens et les ressources pour contrer Buhari. »

Tous les yeux sont tournés toutefois vers Bukola Saraki et Yakubu Dogara, présidents de l’Assemblée et du Sénat, qui n’ont jamais caché leur inimitié envers Buhari bien qu’ils appartiennent à son parti. Ils sont soupçonnés d’être à l’origine du rAPC et devraient rallier le mouvement sous peu.

Dans ce pays fédéral, le président Buhari a déjà perdu le soutien des Etats du centre, victime du conflit pastoral entre éleveurs et agriculteurs qui a fait plus de 1.000 morts depuis le début de l’année.

Le Nord musulman, d’où est originaire l’ancien général est en grande majorité acquis à sa cause, au contraire du Sud-Est, chrétien et en partie de l’ethnie igbo.

C’est donc dans le Sud-Ouest yorouba, et notamment l’Etat de la mégapole de Lagos, qui abrite plus de 20 millions de personnes, que devrait se jouer le scrutin de 2019: ce sera une région clé à remporter dans la course à la présidence.

L’élection du gouverneur de l’Etat d’Ekiti, qui doit se dérouler ce week-end, sera un test de popularité très important pour les deux partis majoritaires, le PDP et l’APC.

 

SOURCE : AFP