La crise qui secoue le Togo depuis plus de neuf mois, va sûrement connaître son épilogue les semaines à venir, la Cédéao ayant pris le taureau par les cornes. Démarré le 19 février dernier sous l’égide du président ghanéen, le dialogue est au point mort, après seulement trois séances: 19 février, 23 février et 23 mars. Les discussions s’enlisent notamment sur la candidature ou non du président Faure Gnassingbé en 2020. Élu en 2005, le président togolais a été réélu en 2010 et en 2015.
La coalition de l’opposition qui manifeste depuis septembre dans les rues, rejette catégoriquement une éventuelle candidature du président de la République en 2020, attitude qui n’est pas du goût du parti au pouvoir: d’où le blocage des pourparlers. Depuis lors, les deux camps se rejettent la responsabilité de bloquer les discussions.
Dans l’actuelle constitution, le mandat présidentiel n’est pas limité. Un projet de loi introduit au Parlement par le gouvernement en septembre et prévoyant notamment la limitation de mandats présidentiels (5 ans x 2) et le mode de scrutin (deux tours), n’a pu être voté. Le texte a été rejeté par l’opposition parlementaire, très attachée au « retour à la constitution originelle de 1992 », avec la formule « En aucun cas, nul ne peut faire plus de deux mandats », visant directement le président Faure Gnassingbé.
La coalition exige également la révision du cadre électoral et l’instauration du droit de vote des togolais de l’étranger.
« On n’acceptera jamais que Faure Gnassingbé se représente en 2020 », a plusieurs fois martelé publiquement Jean Pierre Fabre, chef de file de l’opposition.
Pour certains juristes de haut niveau, ces déclarations n’ont aucun fondement juridique, la constitution actuelle n’ayant pas limité le mandat présidentiel.
« Sur quoi se fondent les leaders de l’opposition pour rejeter la candidature de Faure Gnassingbé en 2020 ? Sur le droit, je ne pense pas. Par des arrangements, les politiques peuvent trouver un terrain d’entente. Mais sur le plan juridique, les arguments avancés par les leaders de la coalition ne tiennent pas », a commenté un professeur de droit.
– La Cédéao à la manette
A l’allure où vont les choses, les chefs d’Etat de la Communauté économiques des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) ont décidé d’agir, en prenant vite le terreau par les cornes.
Premier acte: la nomination le 14 avril dernier à Lomé, des présidents ghanéen et guinéen en qualité de facilitateurs dans la crise qui secoue le pays et la lourde mission confiée à la Commission de la Cédéao de « proposer des recommandations qui seront soumises au prochain sommet de la conférence des chefs d’Etat ».
Et pour joindre l’acte à la parole, des délégations des deux facilitateurs et de la commission de la Cédéao, ont rencontré le 2 juin à Lomé, les protagonistes de la crise, afin de proposer une feuille de route pour un nouveau round de discussions, avant le sommet de la Cédéao, probablement prévu à Lomé. Mais aucune date n’a encore été fixée pour la tenue de cette rencontre.
– Tout le monde retient son souffle –
Coalition de l’opposition, parti au pouvoir, société civile… : tous les yeux sont tournés vers la Cédéao. Même si par moments, certains leaders des 14 partis politiques de la coalition, tentent de se donner de la voix sur des médias, invitant la Cédéao à tenir compte de leurs revendications, la peur gagne peu à peu ce regroupement. Car, certaines pilules seront difficiles à avaler, après la sortie de la Cédéao.
Du côté du pouvoir, c’est le silence radio depuis quelques jours : plus de déclarations, plus de commentaires…
« Ce n’est plus le moment de déclarations tapageuses », a confié un ministre.
Selon certains observateurs de la vie politique togolaise, les semaines à venir seront très denses en matière de tractations sur la crise qui secoue le Togo. Et la première rencontre des deux chefs d’États-facilitateurs avec les protagonistes à Lomé, sera très déterminante.
A en croire certaines indiscrétions, les présidents ghanéen et guinéen seraient attendus à Lomé la semaine prochaine.
NB : Papier proposé par Savoir News à Togo Matin, qui célèbre son 3è anniversaire ce vendredi.