La légende du football George Weah est officiellement devenue président du Liberia lundi en prêtant serment devant des milliers de partisans en liesse et de chefs d’Etat africains dont le président togolais et président en exercice de la Cédéao Faure Gnassingbé, première passation de pouvoirs entre deux présidents élus dans ce pays depuis 1944.
Lors de la cérémonie, dans le stade Samuel Kanyon Doe, une enceinte de 35.000 places bondée en périphérie de la capitale, le drapeau libérien a été abaissé puis hissé pour marquer la transition avec la présidente sortante Ellen Johnson Sirleaf, 79 ans, première femme élue chef d’Etat en Afrique en 2005, face à George Weah.
Le nouveau chef de l’Etat, vêtu d’une tunique blanche, a prêté serment devant le président de la Cour suprême Francis Korkpor.
« J’ai passé beaucoup d’années de ma vie dans des stades, mais le sentiment que j’éprouve aujourd’hui est incomparable », a déclaré, entre les rugissements de la foule enthousiaste, l’ancien attaquant de Monaco, du Paris SG et du Milan AC, 51 ans, seul Africain à avoir remporté le Ballon d’or, en 1995.
« Unis, nous sommes certains de réussir en tant que nation. Divisés, nous sommes certains d’échouer », a ajouté George Weah, qui est seulement, après Samuel Doe (1980-1990), le deuxième président de la plus ancienne république d’Afrique à ne pas appartenir à l’élite « américano-libérienne » descendant d’esclaves affranchis qui y domine la vie politique depuis 170 ans.
Accompagné de son épouse Clar et de ses enfants, il a placé son mandat sous le signe de la lutte contre la corruption : « Nous devons y mettre fin. Nos fonctionnaires doivent avoir un salaire décent », a-t-il dit.
Il a également lancé un appel au secteur privé, en assurant que « le Liberia est ouvert aux affaires ».
Mme Sirleaf, qui ne pouvait plus se représenter après deux mandats, quitte le pouvoir en ayant a réussi à maintenir la paix dans ce pays d’Afrique de l’Ouest ravagé par de terribles guerres civiles qui ont fait quelque 250.000 morts entre 1989 et 2003.
Mais son bilan économique est social est moins brillant et l’extrême pauvreté reste répandue dans le pays.
Son dernier acte à la tête de l’Etat aura été la signature, vendredi soir, d’un décret contre les violences faites aux femmes, incluant une interdiction de l’excision, un texte retoqué par l’Assemblée nationale pour ne pas s’attirer les foudres de l’électorat le plus conservateur.
– Transition écourtée –
L’influente sénatrice Jewel Howard-Taylor, élue vice-présidente et ex-épouse de l’ancien chef de guerre et président Charles Taylor (1997-2003), a également prêté serment.
Facile vainqueur du second tour face au vice-président sortant Joseph Boakai le 26 décembre, George Weah a été intronisé en présence notamment des chefs d’Etat sénégalais Macky Sall, gabonais Ali Bongo, sierra-léonais Ernest Bai Koroma et du footballeur vedette camerounais Samuel Eto’o.
Des files de plusieurs kilomètres de personnes chantant, dansant et agitant des drapeaux libériens s’étaient formées en direction du stade dès le début de la matinée.
« C’est un des jours les plus excitants de ma vie », a expliqué Benjamin Bee, un étudiant de 21 ans venu au stade. »L’homme que je soutiens à présent, le président Weah, est une icône et c’est un exemple pour moi », a-t-il ajouté.
Beaucoup nourrissent l’espoir d’un véritable changement dans leur vie quotidienne, notamment en matière d’emploi et d’éducation.
« Tout l’espoir de ce peuple et de ce pays repose sur lui (Weah) », a déclaré Samuel Harmon, un marchand ambulant de 30 ans.
La période de transition a été considérablement raccourcie par la contestation des résultats du premier tour, le 10 octobre, qui a retardé de sept semaines la tenue du second.
La transformation d’une économie en récession et encore largement dépendante du caoutchouc et du minerai de fer et la réponse aux espoirs d’emplois des jeunes qui l’ont porté au pouvoir figurent parmi les premiers défis du nouveau président.
« Il devra soigneusement gérer les attentes : cette phase d’optimisme sera courte », prévient Elizabeth Donnelly, chercheuse au programme Afrique du centre de réflexion britannique Chatham House.
Selon elle, George Weah « doit faire attention à ne pas trop promettre et s’assurer que les citoyens se sentent impliqués dans ses projets et leur mise en œuvre ».
Avec AFP