« Parler d’une seule voix » pour « exiger la justice climatique »: à l’initiative du Maroc, un sommet africain s’est réuni mercredi à Marrakech, en marge de la COP22, pour « harmoniser » la position de l’Afrique face au réchauffement.
« L’Afrique paie un lourd tribut dans l’équation +climat+ et représente, sans aucun doute, le continent le plus pénalisé », a souligné le roi Mohammed VI, en ouverture du sommet.
« La hausse des températures, le dérèglement des saisons, les sécheresses à répétition appauvrissent la biodiversité de notre continent, détruisent ses écosystèmes et hypothèquent son progrès, sa sécurité, sa stabilité », a énuméré le souverain, « ceci alors qu’il n’émet que 4% des gaz à effet de serre ».
« Ces bouleversements (…) entravent fortement le développement de l’Afrique, et menacent gravement les droits élémentaires de plusieurs dizaines de millions d’Africains», a-t-il déploré.
Il importe donc que le continent africain « s’exprime d’une seule voix, qu’il exige justice climatique et mobilisation des moyens nécessaires, qu’il émette des propositions concertées », avec des “objectifs communs et des « projets régionaux et transnationaux structurants », a souligné Mohammed VI.
Alors que la 22e conférence sur le climat bat son plein, ce sommet africain voulu par Rabat accueille une quarantaine de dirigeants africains, dont une vingtaine de chefs d’Etat, ainsi que le président français François Hollande.
Plusieurs présidents ont ensuite pris la parole, le Rwandais Paul Kagame, le Congolais Denis Sassou Nguesso, et le Sénégalais Macky Sall, qui a rappelé “l’attente” des pays africains après les promesses des pays avancés de financer la lutte contre le réchauffement à hauteur de cent milliards de dollars d’ici à 2020.
Toujours sur le climat, ce sommet est pour l’hôte marocain l’occasion de vendre son initiative Triple A en faveur de l’agriculture africaine, basée en partie sur l’accroissement de la fertilité des terres, alors que le pays – avec ses importantes réserves de phosphate – est l’un des principaux producteurs d’engrais au monde.
– Acteur engagé –
Mais l’enjeu clé pour le royaume est surtout diplomatique. En réunissant une brochette de leaders africains sur son sol, le Maroc entend démontrer son engagement très fort en Afrique, désormais au coeur de sa diplomatie. Avec comme principal enjeu la question du Sahara occidental, et comme objectif à court terme la réintégration du Maroc au sein de l’UA.
« Le Maroc est un acteur engagé, dans la consolidation de la sécurité et de la stabilité régionales. A ce titre, il est déterminé à renforcer sa contribution à la défense des intérêts vitaux du continent, aux côtés de ses pays frères et, bientôt, au sein de l’UA », a clairement réaffirmé mercredi Mohammed VI.
Le roi enchaîne ces derniers mois les tournées diplomatiques sur le continent, non plus seulement dans sa traditionnelle zone d’influence ouest-africaine ou chez son ami, le président gabonais Ali Bongo. Il revient d’un long périple au Rwanda et en Tanzanie, et devrait se rendre à Addis Abeba après la COP22.
Geste symbolique, il a prononcé son traditionnel discours du Trône le 6 novembre à Dakar, proclamant que « le Maroc est de retour pour retrouver sa place naturelle » en Afrique. La diplomatie marocaine, qui a procédé récemment à un important redéploiement, entend désormais exercer son influence sur tout le continent.
L’objectif affiché est de rallier le maximum de soutien sur la question du Sahara occidental, ex-colonie espagnole contrôlée depuis 1975 par Rabat, et dont le Front Polisario, soutenu par Alger, réclame l’indépendance.
Dans l’immédiat, il s’agit d’obtenir la réintégration du Maroc au sein de l’UA, organisation que Rabat avait quittée en 1984 pour protester contre l’admission de la République arabe sahraouie démocratique (RASD) du Front Polisario.
Ce retour, annoncé à la mi-juillet par Mohammed VI et dont la demande a été formalisée officiellement en septembre, donne lieu actuellement à une sourde lutte d’influence avec le rival algérien, toujours autour de la question du Sahara.
Il doit être acté par un vote, et plusieurs questions en discussion, comme le nom du futur président de la Commission de l’UA (son organe exécutif), pourraient en influencer l’issue de façon décisive, alors que le prochain sommet de l’UA est prévu début 2016 à Addis Abeba.
SOURCE : AFP
En Photo: Faure Gnassingbé (à gauche), lors de la rencontre.