La 22ème Session de l’Assemblée parlementaire paritaire ACP-UE, s’est ouverte lundi dernier à Lomé où députés européens et ceux des pays ACP débattent des conséquences du Printemps arabe en Afrique sub-saharienne, de la crise alimentaire dans la Corne de l’Afrique et du poids de l’endettement sur le développement des pays ACP. Ils se penchent également sur les défis liés à la santé et l’énergie, sur la situation des jeunes et sur la gouvernance démocratique au Togo. Pour Mme Brigitte Kafui Adjamagbo-Johnson de la Convention Démocratique des Peuples Africains (CDPA, opposition), la tenue de cette réunion à Lomé est une « très bonne chose pour le Togo », les sujets abordés étant « très préoccupants ».
La candidate malheureuse à la présidentielle de mars 2010 s’est également prononcée sur le discours prononcé par le chef de l’Etat Faure Gnassingbé à l’ouverture de ces assises.
Savoir News: Quelles analyses faites-vous des thèmes débattus par les députés européens et ceux des pays ACP actuellement en session à Lomé?
Mme Brigitte Kafui Adjamagbo-Johnson: Cette session qui se tient chez nous est une très bonne chose pour le Togo. J’espère que cela nous permettra de faire des avancées dans le domaine de l’approfondissement de notre démocratie. Les sujets qui sont abordés sont des sujets très préoccupants et je pense qu’il est intéressant que des assisses de ce genre où élus des pays ACP et ceux de l’UE puissent débattre de ces genres de sujets, mais de manière franche. En tout cas, j’ai eu l’impression, en écoutant les différents discours qui ont été prononcés à la cérémonie d’ouverture, que les débats lors des travaux préparatoires ont été d’une certaine franchise.
Savoir News: Le chef de l’Etat a prononcé à l’ouverture des travaux, un discours. Quelles appréciations faites-vous du discours de Faure Gnassingbé?
Mme Brigitte Kafui Adjamagbo-Johnson:<
/strong> Nous avons constaté que les points qui ont été abordés par le chef de l’Etat sont effectivement des points importants. Ces points ont été présentés dans un langage qui s’est voulu franc et vrai; ce qu’aurait souhaité bon nombre de Togolais et d’africains. Mais en dehors de cette remarque générale, personnellement, j’aurais voulu que l’analyse soit plus approfondie, notamment lorsque le chef de l’Etat aborde la question de bonne gouvernance. Relayant le message du Pape Benoît XVI lors de sa visite au Bénin, Faure Gnassingbé a fait observer qu’il était important de s’occuper de la jeunesse pour éviter des frustrations. Je pense qu’il aurait allé plus loin, parce qu’au-delà de cette nécessité de préparer vraiment un avenir pour la jeunesse, d’offrir de perspectives concrètes à la jeunesse pour qu’elle participe à la vie du pays et au développement de la nation, les propos de Pape Benoît XVI, posent aussi le problème de l’alternance. Aujourd’hui, la gouvernance a besoin d’être à la fois économique et démocratique. Cette gouvernance démocratique veut nécessairement qu’on intègre et qu’on fasse de l’alternance, une réalité dans nos pays. La Libye nous en apporte la preuve. Les populations ont eu la chance dans ce pays d’avoir eu accès à un régime qui a privilégié la question des droits économiques et sociaux. Mais, on a bien vu ce qui s’est passé, le fait de n’avoir pas fait attention aux droits politiques, aux libertés publiques et individuelles et à la question de l’alternance.Savoir News: Faure Gnassingbé a abordé quatre principaux sujets dont le fonctionnement de la Cour Pénale Internationale (CPI). Il est allé très loin en suggérant la mise en place d’une « Cour Pénale Africaine ». « Nous avons l’impression que seuls les citoyens d’un continent sont traînés devant la CPI. C’est une impression qui n’est peut être pas vraie, mais elle est là. Et si nous voulons que la CPI garde sa crédibilité, nous devons aussi renforcer les systèmes judiciaires nationaux. La CPI doit être quelque chose de transitoire. il faudrait que chaque nation, chaque pays, chaque Etat, puisse juger les personnes qui sont coupables de crimes, quels que soient ces crimes. Il faudrait aussi que le jugement soit accompagné de ce que nous expérimentons ici. La CVJR que nous avons mise en place nous permet aussi, non pas seulement de faire confiance à une Cour supranationale pour juger des coupables de crimes (…) ». Comment jugez-vous les propos de Faure Gnassingbé?
Mme Brigitte Kafui Adjamagbo-Johnson: Effectivement beaucoup d’africains pensent la même chose que lui de la CPI. C’est vrai qu’il y a des alternatives, c’est vrai qu’il faut faire attention pour que la CPI n’apparaît pas comme un épouvantail qui est prévu uniquement pour les pays africains, les dirigeants africains. J’apprécie qu’il ait rappelé qu’il y a d’autres alternatives telle que la CVJR, qui est une formule de justice transitionnelle Mais ce que je dois ajouter, c’est qu’elle peut servir d’alternative à condition qu’elle ne soit pas instrumentalisée, à condition qu’il y ait véritablement une volonté politique de faire en sorte que cet outil de justice transitionnelle serve véritablement à atteindre les objectifs de réconciliation nationale.
Savoir News: Certains observateurs disent avoir « méconnu » lundi dernier Faure Gnassingbé à travers son discours improvisé, surtout devant des parlementaires ACP-UE. Avez-vous le même sentiment?
Mme Brigitte Kafui Adjamagbo-Johnson:<
/strong> Nous avons été surpris de constater que le chef de l’Etat ait fait preuve d’une certaine franche dans son discours. Mais la question n’est pas là. Il faut aller au-delà des discours. Après ce discours qu’il a tenu, ce que la CDPA attend, c’est d’œuvrer véritablement à la consolidation de la démocratie, de la bonne gouvernance démocratique et politique dans notre pays. Et de faire en sorte que l’alternance que les togolais et les togolaises attendent de tout leurs vœux se concrétise.Propos recueillis par Junior AUREL
Savoir News, le journalisme est notre métier
www.savoirnews.net, l’info en continu 24/24H