Après Lomé, Dapaong, Kara, Sokodé, Atakpamé et Tsévié, les membres de la Commission Vérité, Justice et Réconciliation (CVJR) ont posé leurs valises à Aného (environ 45 km à l’est de Lomé) où les audiences publiques, privées et à huis clos ont démarré ce mardi, a constaté un envoyé spécial de l’Agence Savoir News.
Plusieurs autorités locales dont le préfet de la localité Edan Akouétè, étaient présentes à la cérémonie d’ouverture ce matin à la cathédrale Sts Pierre et Paul à Aného.
Les audiences de ce mardi sont consacrées aux événements liés au 5 octobre 1990 et aux violences électorales de 2005.
A Aného, les équipes techniques de la CVJR ont enregistré, lors de la phase des dépositions, 910 dépositions, plaçant cette ville à l’avant-dernière position en termes de ratio, pour le nombre de dossiers recensés lors des témoignages par interview, a souligné Mgr Nicodème Barrigh-Benissan.
« A l’époque, tous les observateurs ont noté que les populations d’Aného étaient quelque peu sceptiques et réticentes à participer aux travaux de la CVJR. Pourtant à l’examen des dossiers reçus, nous avons compris l’ampleur des drames vécus dans cette ville, particulièrement lors des évènements, ainsi que notre aspiration profonde à la paix et à la réconciliation », a-t-il souligné.
Mgr Barrigah-Benissan a indiqué qu’à l’analyse des dossiers, il apparaît qu’en réalité, la population d’Aného n’est pas opposée à la réconciliation, mais qu’elle demande si cette réconciliation est possible, après les graves tragédies dont la ville a été le théâtre.
« Voilà pourquoi, en ouvrant ce matin l’étape des audiences dans cette ville meurtrie, je voudrais renouveler, à l’adresse de tous les cœurs blessés, notre sincère compassion et notre appel à l’espérance. La CVJR ne désespère pas de sa mission, elle sait combien la réconciliation est difficile, mais elle sait également qu’il s’agit d’une condition incontournable de notre vivre ensemble », a-t-il précisé ke Prélat.
Il est important, a-t-il poursuivi, de « tourner les pages douloureuses du passé qui continuent encore d’empoisonnement le présent, car la survie de la population collective en dépend. Et pour tourner la page sombre du passé, il faut d’abord le lire pour ne tirer les leçons qui s’imposent ».
« Ici à Aného, ces audiences se regroupent essentiellement en deux périodes : les évènements antérieurs à 2005 et les violences consécutives à l’élection présidentielle du 24 avril 2005. Comme lors des étapes précédentes Lomé, Dapaong, Kara, Sokodé, Atakpamé, Tsévié, c’est sur la base des dossiers que nous avons sélectionnés et en fonction de la disponibilité des protagonistes qui auront donné leur accord, que nous laisserons la parole aux victimes, aux témoins et auteurs présumés, afin qu’ils expriment de vive voix la douleur et la souffrance pour les violences subies, ou encore le repentir et le regret pour les méfaits commis », a ajouté Mgr Barrigah-Benissan, précisant que « la tâche est extrêmement difficile, mais qu’elle n’est pas impossible ».
« Nous continuons de croire que la réconciliation est possible. Je sais que les corps restent encore marqués et les cœurs blessés par ces drames, pourtant, j’ose espérer que nous trouverons au plus profond de nous-mêmes, l’énergie nécessaire pour résister à la vengeance », a-t-il soutenu.
Pour le préfet des Lacs, ces audiences « sont un moment unique pour tous ceux qui se sentent meurtris dans leur chair par les violences politiques, de ces dernières décennies, de vider sans peur leur cœur ».
Edan Akouétè a invité les populations, plus particulièrement celles de la préfecture de Vo, de Bas-Mono et des Lacs « à ne pas rater ce rendez-vous avec l’histoire ».
Rappelons que les audiences de la CVJR sont consacrées à la recherche de la vérité sur les violences électorales et autres violations des droits de l’homme qui sont survenues dans notre pays entre 1958 et 2005 dans le cadre des séances publiques, à huis clos et privées qui donnent la parole aux victimes, témoins et aux auteurs présumés.
D’Aného, Nicolas KOFFIGAN
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