Les Burkinabé votent ce dimanche pour la première présidentielle sans Blaise Compaoré depuis 30 ans

Les Burkinabè ont commencé à voter dimanche matin pour la première présidentielle depuis la chute il y a un an du régime de Blaise Compaoré, resté 27 ans à la tête du Burkina Faso, à l’histoire marquée par les coups d’Etat.

Quelque 5,5 millions d’électeurs sont appelés à participer à ce scrutin couplé à des législatives, qui doit tourner la page de la transition mise en place après l’insurrection populaire qui a chassé Compaoré, qui tentait de modifier la Constitution pour pouvoir briguer un nouveau mandat.

Au lycée Bambata, près du stade municipal au centre-ville de Ouagadougou, le bureau a ouvert avec quelques minutes de retard.

Le premier votant, Hamidou Zongo, un commerçant de 33 ans, a déposé ses deux bulletins – un pour la présidentielle et un pour les législatives – dans les deux urnes avant de tremper son doigt dans un encrier.

A l’école primaire de la Patte d’Oie située dans le nord de la capitale Ouagadougou, les premiers votants pu déposer leurs bulletins quelques minutes après 6h00.

« Une fois que le grand manitou (Compaoré) n’est pas là, c’est plus libre et plus démocratique », a estimé Ousmane François Ouedraogo, 65 ans.
Les bureaux de vote ouvrent doivent ferment à 18H00 (locales et GMT). Les résultats provisoires devraient être annoncés lundi soir, selon la Commission électorale.

– Sas de décontamination –

« Pour la première fois depuis 50 ans, il y a une incertitude électorale, on ne connaît pas le vainqueur à l’avance », analyse Abdoulaye Soma, président de la Société burkinabè de droit constitutionnel, qui pronostique un taux de participation supérieur aux scores habituels lors des élections de l’ère Compaoré (autour de 50%).

Prévues le 11 octobre, ces élections avaient été reportées au 29 novembre en raison du coup d’Etat manqué du 17 septembre, mené par un ancien bras droit de l’ex-président Compaoré, le général Gilbert Diendéré, qui a depuis été arrêté.

La mobilisation populaire a mis le putsch en échec et l’attente est désormais grande dans ce pays pauvre d’Afrique de l’Ouest d’un peu moins de 20 millions d’habitants, qui espère voir ces élections ouvrir une longue ère démocratique.

Quatorze candidats dont deux femmes sont en lice pour un mandat de cinq ans renouvelable une seule fois.

Roch Marc Christian Kaboré et Zéphirin Diabré, deux anciens ministres passés dans l’opposition avant la chute de Compaoré, sont considérés comme les favoris du scrutin.

Aucun membre de la transition politique – président et ministres – n’est autorisé à participer à cette élection.

C’est la première fois depuis le début des années 1980 que M. Compaoré sera physiquement absent d’une élection nationale. Son mouvement, le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), qui remportait tous les scrutins, ne sera plus représenté à la présidentielle, en vertu d’une loi interdisant aux pro-Compaoré ayant soutenu le projet de révision constitutionnelle de briguer des mandats.

Le CDP présente toutefois des candidats aux législatives et pourrait réaliser un beau score. L’ombre du « Beau Blaise », exilé en Côte d’Ivoire voisine, plane sur l’élection.

Sept des 14 candidats à la présidentielle ont été plus ou moins des compagnons et des barons du régime déchu : C’est le cas de MM. Kaboré et Diabré.

Le premier est resté avec M. Compaoré pendant 26 ans, occupant les prestigieux postes de Premier ministre et de président de l’Assemblée nationale. Il a aussi été patron du CDP avant de tomber en disgrâce, quittant le parti 10 mois avant la chute du régime.

Quant à M. Diabré, même s’il a travaillé dans le privé pendant de longues années, il doit une grande partie de sa carrière à l’ex-président. « J’ai quitté les affaires de l’Etat en 1997. Je suis passé par le sas de décontamination! », a-t-il dit.

Environ 25.000 membres des forces de l’ordre ont été déployés pour sécuriser l’élection dans ce pays à majorité musulmane, qui a été touché pour la première fois de son histoire par le jihadisme en 2015. Plusieurs attaques, dont la plus spectaculaire a coûté la vie à trois gendarmes et un civil en octobre, se sont produites près de la frontière avec le Mali, ébranlé le 20 novembre par l’attaque sanglante d’un grand hôtel à Bamako (20 morts).

SOURCE : AFP